lundi 29 juillet 2019

Publication 4 : mardi 30 juillet 2 019
Étape 1 : Tannay, 22 km : dimanche 17 mai 2 015
Photo: l'église de Tannay

Un premier contact rassurant avec le chemin :
            Il était plus de 9 h quand je suis sorti de la cathédrale. Je n'étais plus pressé, j'étais serein, et il faisait beau. Je n'ai plus senti la présence des autres pèlerins quand j'ai descendu la rue Saint-Pierre. Les contractures aux cuisses ne m'alarmaient pas. À l'échauffement, il y avait toutes les chances pour qu'elles disparaissent.
            Après avoir passé la porte de Vézelay, et tourné à gauche sur la départementale, j'ai rapidement retrouvé la bifurcation pour la voie de Bourges que j’avais reconnue la veille, et un peu plus loin la gendarmerie et la stèle tout à côté. Les balises de Vézelay m'ont paru un peu trop petites à mon goût, même si la pointe du triangle jaune indiquant la direction se détache bien du fond bleu portant la balise européenne. Et ce d'autant que j'allais me rendre rapidement compte qu'elles étaient rares sur bien des tronçons, et que le balisage Vézelay ignore le « tourne à gauche », le « tourne à droite » (j'en ai vu qu'un seul sur tout le chemin), et aussi la croix qui interdit de prendre telle ou telle branche à une intersection. Sans compter le manque criant de balises de confirmation qui rassurent lorsqu'il n'y a pas d'intersection sur une très longue distance. Une question d'économie pour l'association qui s'en occupe ?
            Ainsi, avant d'arriver au petit transformateur électrique, point de repère du guide « Lepère », pour ce qui est du calvaire qui se trouve sur une hauteur, il aurait été mieux de placer une croix pour écarter le chemin qui y monte.
            Dans la traversée du bois de Molay, en attendant un château d'eau signalé dans le guide, quelques petites balises auraient permis de rassurer le pèlerin pour lui signifier qu'il est toujours sur le chemin. Qui dit château d'eau dit structure en hauteur, et surtout la proximité d'une agglomération ! Et ce quelle que soit son importance, mais celui-là tardait à se faire voir. Et ce d'autant que ce repère est complètement dissimulé dans la végétation sur la droite du chemin, et qu'en aucune façon il peut être visible de loin.

Des ornières profondes remplies de boue :
            Et pourtant, dans la 2e forêt, dans la continuité du chemin, j'ai rencontré de larges ornières remplies d'eau boueuse, creusées sans doute à la suite de fréquents passages de gros engins travaillant dans cette forêt ; et sans doute aussi en raison de l'imperméabilité du terrain à cet endroit. Il n'y avait pas seulement quelques points délicats à négocier : à un moment, j'ai dû quitter la piste pour tracer sur une longue distance mon propre chemin, et la présence de plantes épineuses dans les environs immédiats m'obligea même à m'éloigner un peu plus encore. La vigilance était de rigueur si je voulais rester dans la direction générale du chemin.
            Puis j'ai dû quitter cette piste qui continue dans une partie de cette forêt annoncée comme privée, pour tourner à droite le long d'une clôture, et qui débouche sur un autre chemin que mon guide conseille de prendre à gauche – ce qui n'était pas évident sur le terrain : j'ai un temps hésité, mais en y regardant de près dans un des angles d'un poteau, j'ai déniché une petite balise qui indique bien cette direction. Guy, un pèlerin que j'ai rencontré bien plus loin sur ce Vézelay, qui avait pris à droite, me raconta le temps qu'il lui a fallu pour rétablir la situation dans cette partie.

Une sortie surprenante de la zone des forêts :
            J'ai continué sur des portions où je n'étais pas sûr du tout du bon chemin, pour débarquer sur une route bitumée, et je suis entré ensuite dans la forêt de Maulay. Je suis arrivé à un carrefour où il n'y avait pas de balise et, après vérification des différentes branches, j'ai fini par en trouver une cachée dans les arbres et bien loin de l'intersection. Un « tourne à droite » préventif et des croix au départ des branches à ne pas prendre m'auraient fait gagner du temps et plus d'assurance pour la suite.
            Je suis parvenu enfin à la lisière de cette forêt, mais au bord d'une presque dépression géologique : il fallait descendre dans un chemin à travers les bois pour atteindre tout à fait en bas une vaste plaine cultivée et la D165. Ce fut alors ma première halte, où j'ai pris le temps de manger un petit quelque chose avant de me diriger vers le village de Maison-Dieu.

Une première vraie difficulté sur le chemin :
            Après l'église de ce village, au carrefour, je ne me suis pas engagé sur cette D165 qui invitait à aller vers Metz-le-Comte et Tannay, j'ai suivi un balisage qui emmenait les pèlerins dans des champs.
            Le passage dans ces champs fut assez long, et je suis arrivé ensuite sur une autre départementale, la D280. La route serpente dans le paysage et la pente devient même assez forte au bout d'un moment.
            Il n'y avait plus de balise, de quelque nature que ce soit, à l'approche de Metz-le-Comte, je suis revenu sur mes pas, car je me souvenais qu'au bas de la partie la plus pentue, une vieille pancarte métallique portant à la fois les couleurs du GR et l'inscription Compostelle de Vézelay invitait à tourner à droite dans les champs.
            Au début, ce chemin de randonnée est large, acceptable, mais il se rétrécit vite pour devenir juste praticable, car envahi par de hautes herbes ; ayant déjà écarté l'autre possibilité, j'ai continué en devinant parfois le passage, me retrouvant à un moment entre deux petits canaux d'irrigation au point de mouiller complètement mes chaussures, car l'eau suintait de partout ; et, comme le dit mon guide, j'ai fini par atterrir sur la départementale D985, qui est à flanc de colline, le long de la  vallée de l'Yonne. Je devais retrouver en face du point d'arrivée sur cette départementale une petite route qui mène au fond de cette vallée pour justement franchir l'Yonne. Eh bien, de petite route en face, il n'y en avait pas !
            Vraisemblablement, je n'étais pas au bon point de chute sur cette départementale, et je décidais de prospecter sur une distance de 100 m de chaque côté de mon point d'atterrissage. Toujours rien ! Il fallait donc élargir la reconnaissance ; je décidais d'arrêter une voiture – il n'y en avait pas beaucoup qui circulaient sur cette petite route en ce dimanche. Ce n'est qu'au bout du 3e essai qu'une voiture s'arrêta. À bord, des gens bien habillés, sympathiques, qui vraisemblablement devaient aller à une cérémonie ou à une fête, m'ont dit que la fameuse petite route que je cherchais était un peu plus loin... sur ma droite.

La petite vallée de l'Yonne :
            J'ai avalé rapidement cette petite route pour passer deux ponts et me retrouver sur le canal du Nivernais, et là j'ai rencontré encore des problèmes de balisage. Il y avait une belle aire de pique-nique et de bons équipements, je me suis dit que le mieux était de manger un bon morceau tout en étudiant la situation, selon que je choisissais de passer par Asnois ou de suivre le canal. Il se trouve qu'un groupe important de gens y faisait la fête, et, en prenant toutes mes précautions, j'ai abordé quelques-uns de ces pique-niqueurs pour me renseigner. Les explications que j'ai reçues étaient simples : pour Tannay, il suffit de remonter le canal et à l'écluse après le pont de l'Âne, prendre la route à droite et monter sur la colline. Réflexion faite, et après avoir consulté mon guide, si j'avais fait les départementales en passant par Metz-le Comte, j'aurais gagné beaucoup de temps, mais je me suis tenu au chemin classique. Ce n'est que les jours suivants que j'ai compris que lorsque « Compostelle » disparaît par manque de balises, c'est le GR qui prend de facto la relève, mais sans qu'il y ait eu auparavant la moindre collaboration entre les associations de Compostelle et la FFRP. Qui prend la relève ? Mais parfois pour balader le pèlerin dans la campagne !

Le reposant canal du Nivernais :
            Je suis reparti ensuite en longeant le canal du Nivernais. Presque plat et donc reposant, surtout avec l'eau à proximité. Le côté désagréable : la couleur jaune verte de l'eau, sans doute en raison des pluies les jours précédents. Mais, un peu plus loin, au pont de l'âne, j'ai voulu vérifier la bonne direction, aussi j’ai interrogé un homme qui manœuvrait son bateau sur le canal, mais c'était un étranger qui ne connaissait pas grand-chose à la région. Un autre, un peu plus loin sur le canal, me le confirma. À la 2e écluse, je suis arrivé à une intersection avec la départementale qui monte à Tannay. Après le passage d'une voie ferrée, le GR voulait me faire passer par un chemin en terre dans des bois, sans doute pour m'éviter des longueurs. Je ne l'ai pas pris, car j'en avais assez de la boue pour aujourd'hui. J'ai donc suivi la départementale, et j'ai atteint mon but !

         Arrivé à l'église de Tannay, pour ne pas perdre du temps, j'ai demandé à une dame qui était sur la place l'adresse du « Relais Fleuri » où j'avais réservé. Il était à deux coins de rue de l'église.

Enfin, une bonne nuit !
Après la douche, je suis descendu au bar de l'établissement, au rez-de-chaussée, pour prendre une « pression », que j'ai appréciée après ces efforts et ces appréhensions, et pour obtenir pour le code wi-fi de la maison, de façon à faire des économies de connexion Internet sur mon portable, le coût du roaming étant conséquent.
            Puis je suis allé faire un tour dans Tannay, afin de prendre les habituelles photos à l'arrivée d'une étape et de faire une petite reconnaissance du chemin. Il importe de quitter la ville facilement le lendemain. C'est au cours de cette petite balade que j'ai vu arriver deux pèlerins qui me semblaient hésitants quant à la suite de leur journée, et que j'ai abordés – c’est d’ailleurs le lendemain que j’ai commencé à cerner la réalité de ces hésitations. Ils cherchaient un point de chute. Je leur ai dit tout simplement que j'étais à tel endroit, tout près, et que, vraisemblablement, il y avait encore de la place. Je les ai retrouvés le soir au restaurant de l'établissement.
            Le dîner était prévu pour 20H, mais, par habitude, je me suis pointé vers 19H45. Bien des convives étaient déjà installés dans la salle du restaurant, y compris les deux pèlerins rencontrés l'après-midi. La responsable me montra une table, mais passant devant celle des deux pèlerins, je leur ai demandé simplement si je pouvais dîner avec eux, ce qu'ils ont accepté d'emblée – je me devais d’aller vers eux, pour moi-même. La question des commandes fut rapidement résolue, il n'y avait guère de choix : c'était un repas assez léger en somme : soupe, poissons, dessert. Après des présentations détaillées, nous avons échangé sur les motivations qui nous avaient amenés là. Avec des expérimentés du chemin, le courant passe vite, l’essentiel est vite ciblé. J’avais cependant remarqué que si la dame avait la parole relativement facile, l’homme était bien réservé. Tous les deux semblaient prendre à plaisir à rester à table. 
            Ce fut un grand moment de détente. J'étais bien ; les heures à venir ne pouvaient être qu'apaisantes. J'avais du sommeil à rattraper après une nuit dans l'avion et la suivante dans un dortoir où un gros ronfleur avait assuré la sonorisation.


Publication 3 : 30 juillet 2 019

Dimanche 17 mai 2 015 : avant les premiers pas sur le chemin de Vézelay

Une nuit sans vrai repos :


            Le soir, dans le dortoir, après une journée harassante et surtout pleine de surprises, je m’attendais à trouver un bon sommeil réparateur. Le grand dortoir était pratiquement plein, mais nous n’étions pas les uns sur les autres – il y avait même une séparation bien large entre les deux rangées de lits. Mais pour ce qui est du repos avant la marche proprement dite, ce fut loin d’être le cas.

            La première partie de la nuit s'est bien passée, mais dans la deuxième j'ai été tenu éveillé par un bon ronfleur. Un vrai, qui régulièrement courait derrière sa respiration, et à qui j'aurais pu aussi décerner une médaille d'or dans cette « spécialité ». Ce n'était pas mon voisin immédiat, mais celui de la rangée d'en face – j'entendais aussi d'autres pèlerins qui bougeaient souvent et anormalement au lit, signe qu'ils étaient, eux aussi quelque peu dérangés. Mais comme il se doit entre pèlerins, il n'y a eu aucune protestation ouverte dans le dortoir. Naturellement, pour faire face à cette situation, j'ai essayé de filtrer au mieux cette nuisance en enchaînant dans une certaine mesure les recettes « a minima » classiques : se racler la gorge, tousser un peu fort, etc. Aucun effet, l'homme relançait même sa machine. Comme c'est le plus souvent le cas, il dormait sur le dos, la meilleure position pour exercer son « art ». Peut-être que j'ai dû avoir quelques petites séquences d’un sommeil très léger. À un moment, je l'ai vu se lever et se diriger vers les toilettes, les premières petites lueurs du jour commençaient à apparaître entre des rideaux mal tirés à une fenêtre non loin de mon lit. Quand je l'ai vu repartir à sa place, je me suis dit que la situation allait s'arranger et que je pourrais alors compter sur une dernière petite relance du sommeil, et ce d'autant qu'il s'était mis sur le côté, mais, contrairement à la plupart des « malades », même dans cette position, il a repris aussitôt son concert. Il ne me restait plus qu'à aller faire ma toilette. D’ailleurs, un autre pèlerin de la chambrée ne tarda pas à avoir la même idée. J'ai eu la chance par la suite de ne plus le revoir dans des gîtes ni sur le chemin ; contrairement à moi, il avait sans doute au départ pris la variante de Nevers.

             Partir du moment où j'ai commencé à bouger, et ce malgré des précautions pour éviter de faire du bruit, les autres n'ont pas tardé à se remuer sauf le ronfleur qui, lui, est resté sous sa couverture, sans doute pour se reposer un peu avant de se lever – toute plaisanterie mise à part, il n'est pas sûr qu'il ait lui-même passé une bonne nuit, les apnées du sommeil sont aussi très fatigantes. Arrivé dans la cour, quand j'ai vu que la porte qui donne sur la rue était fermée, j'ai eu envie un moment de retourner dans le dortoir, mais j'ai préféré déposer mon sac 
et je me suis assis sur le perron. J'avais du temps à tuer. Finalement, m'approchant de cette porte, j'ai compris qu'elle était simplement poussée. J'ai repris mes affaires et je suis sorti. Tout le quartier était plongé dans un grand silence. En ce dimanche 17 mai 2 015, à 7 h, Vézelay semblait dormir encore, et il faisait jour. J'ai descendu la rue dans l'espoir de trouver un bar ouvert et de prendre un petit déjeuner. Tout était fermé ; aussi je suis remonté à la cathédrale, car avant de partir, je devais assister à la cérémonie de prières, tellement recommandée par le religieux qui m’avait accueilli.

Un bon petit déjeuner :

            Sur cette place, j'ai remarqué un bar-restaurant non repéré la veille. Dans une salle donnant sur la rue des couverts pour le petit déjeuner étaient déjà mis. La porte d'entrée étant ouverte, je me suis dirigé vers une dame qui s'affairait dans un couloir. À petits pas, sourire aux lèvres, dans le sens où je voulais lui dire comprendre que j’étais bien conscient que je la bousculais un peu pour le service. C'est encore fermé, me dit-elle ; et, après un court moment de silence, elle m'a dit gentiment : et vous voulez ? J’avais réussi mon opération. Elle me dirigea vers une petite salle. Étant le seul client à cette heure, j'ai été rapidement et bien servi : thé, tranches de pain grillé, beurre, confiture, croissant, jus d'orange. J'ai pris tout mon temps, la cérémonie religieuse à côté ne commençait qu'à 8 h. Il faut savoir aussi dans certaines circonstances pousser un peu ce qui est établi. Avec des précautions quand même !

Une belle cérémonie à la cathédrale :

            J'ai eu vite l'impression en entrant dans la cathédrale d'être le retardataire à cette cérémonie. Pourtant, il n'y avait pas beaucoup de monde, mais tout le public participait pleinement aux chants liturgiques. J'étais à peine à ma place que l'hospitalier du gîte avec qui j'avais bien discuté la veille est venu me remettre un livre de prières. Et la religieuse qui menait la cérémonie annonçait régulièrement la page et le numéro du psaume retenu. Tout ce petit monde dans les bancs essayait de chanter au mieux, mais ce sont les religieuses et les religieux qui assuraient l'essentiel. Au bout d'un quart d'heure,
j'étais un peu irrité par ce qui me paraissait être des séries de répétitions, pressé que j'étais de sortir pour tester mon état physique. C'était alors une véritable épreuve de patience. Pourtant, en filmant un peu cette cérémonie, petit à petit je suis entré dans cette atmosphère, et j'ai ensuite ressenti la beauté, la qualité de la prestation des religieuses ; j'étais même, à la fin, comblé quand l'une d'entre elles s'est mise à la flûte. C'était vraiment beau, le temps ne comptait plus.


            À la fin des prières, après une partie dirigée par la mère supérieure, le curé a réuni les pèlerins dans un coin de la cathédrale pour les bénir et leur remettre un opuscule reprenant une partie des évangiles. Après Jean au Puy-en-Velay, c'est avec Luc que je partais sur le chemin de Vézelay – ce petit texte est une réécriture de l’apôtre présentée comme plus adaptée à notre époque ; bien plus tard, après une comparaison avec une bible éditée en 1 955, j'avoue préférer l'ancienne rédaction, bien que je ne sois en aucune façon un vrai pratiquant de l'évangile et encore moins un expert.

vendredi 19 juillet 2019



Publication du samedi 20 juillet 2 019


Samedi 16 mai 2 015

Un Vézelay qui se refusait à moi ?

            Photo : une rue de la petite ville


            Un peu plus d’un mois avant le départ sur cette voie, en avril 2 015, j’avais surmonté une douleur musculaire sur le haut de la cuisse droite, et j’ai pris l’avion pour la France. J’avais rendez-vous à Paris avec Daniel Dumont, un des créateurs de l’ARCC (association des Amis Réunionnais des Chemins de Compostelle) avec qui je devais faire une première partie de cette voie. Le fait de voyager toute une nuit dans l’avion du Réunion-Paris a réactivé cette douleur si bien, alors que je n’avais pas encore vu Daniel à Paris, dans l’après-midi de l’arrivée, j’ai cru bon d’essayer avec mon sac-à-dos de faire le tour du quartier où j’avais retenu une chambre d’hôtel pour me tester. Résultat : il me fallait annuler le départ pour le lendemain – et j’ai bien fait puisque le soir même j’avais des difficultés à entrer dans la baignoire pour me doucher. J’ai dû annoncer à Daniel que j’étais vraiment désolé de ne pas l’accompagner le lendemain, et que j’avais décidé de renter à la Réunion au plus vite. Le Vézelay se refusait à moi !

            À la Réunion, pendant un peu plus d’un mois je me suis soigné et j’ai repris mes marches habituelles dans les hauts de mon village de Bois-de-Nèfles Saint-Paul. Et ensuite je suis reparti à Paris… je ne pouvais accepter cette sorte de fatalité.

            Mais j’ai dû faire face encore à des difficultés vraiment imprévisibles, incompréhensibles…Ce Vézelay continuait de se refuser à moi ! En effet, tout a commencé à l’aéroport d’Orly où j’ai dû faire une queue interminable pour le passage à la police, les passagers de plusieurs vols dont un venait d’Afrique ont été rassemblés pour les formalités de contrôle. Mais j’étais décontracté, je savais que Laurent, mon neveu, qui vit à Paris, était à ma disposition pour me conduire en voiture au départ de ma marche, ce qui simplifiait grandement la journée, car autrement il aurait fallu passer de bus en bus pour rejoindre en fin de journée mon départ. J’étais heureux !

            Arrivé sur place en fin de matinée, nous avions laissé la voiture au parking en bas du village – les voitures des visiteurs ne montent pas dans cette petite ville – et j’ai demandé à mon neveu de m’accompagner pour aller régler si possible la question du gîte au « Centre Sainte Marie-Madeleine »
L'entrée du Centre Sainte Marie Madeleine
, une occasion aussi pour lui de faire connaissance avec ce lieu tant visité. Nous y avons été bien accueillis étant bien entendu que les formalités seront accomplies dans l’après-midi. Nous sommes redescendus au parking, mon intention était de libérer mon chauffeur, son travail étant terminé.

            Il ne me restait plus, arrivé à la voiture, qu’à prendre ma valise, à composer mon sac-à-dos pour la marche, et à renvoyer les autres affaires disons « civiles » chez ma nièce qui habite aussi dans la région parisienne. Mais surprise en ouvrant ladite valise : son contenu n’avait absolument rien à voir avec mes propres affaires. Je me suis tout simplement trompé de valise en voulant faire vite au tapis roulant de l’aéroport – à tous les coups, c’était celle d’un voyageur qui venait d’Afrique.

            Nous sommes restés tous les deux pendant de longues minutes sans dire un mot. J’étais vraiment abasourdi, et Laurent aussi ! Mais je me suis dit qu’il fallait quand même faire le match jusqu’au bout… même si c’est pour être définitivement écarté de mon projet in fine ! Et mon chauffeur m’a dit : on retourne à l’aéroport… beaucoup de kilomètres nous attendent !

            À Orly, nous sommes allés directement au bureau où se trouvent les objets non récupérés… En entrant dans la salle, avant que je ne m’explique avec l’employé qui réglait une question avec une voyageuse, j’avais déjà repéré ma vraie valise… en me disant quand même : voilà une qui ressemble bien à la mienne ! Et c’était le cas ! le vent avait tourné… je me suis expliqué avec le responsable de ce service, en le priant de présenter mes excuses au vrai propriétaire du bagage que je rapportais. Le Bon Dieu avait sans doute fini de me tester. Le retour à Vézelay fut des plus joyeux.

            Arrivés au parking, sans me préoccuper des touristes qui y circulaient, je me suis déshabillé, pour enfler ma tenue de marche ; j’ai composé mon sac-à-dos, et j’ai libéré Laurent…en me disant : j’espère que j’ai encore une place au gîte des religieux !

            Inutile de dire que sac au dos, j’ai dû faire un petit record dans l’ascension de cette butte sur laquelle se trouve cette petite ville ; en pénétrant dans le bureau d’accueil, le responsable qui m’avait accueilli le matin leva les bras au ciel : mais nous nous demandions où vous étiez passé… J’ai à peine commencé à lui raconter mon histoire qu’il m’arrêta : réglons les formalités et je vous conduis ensuite au dortoir pour que vous puissiez prendre possession de votre lit.

            Et en moi-même je me suis dit : j’ai gagné le match… pour aussitôt atténuer ce jugement : Merci Seigneur de m’avoir aidé !

            En fin de journée, j’ai fait un tour sur la place de la cathédrale
La place de la cathédrale de Vézelay




















et ensuite une petite reconnaissance du chemin au départ de ce Vézelay, au bas de la ville – il ne fallait surtout pas rater de prendre le lendemain l’option voie de Bourges. 
Le départ par la voie de Bourges



mercredi 17 juillet 2019



Le 17 juillet 2 019



Pourquoi revenir sur le Vézelay ?

Photo : à deux pas du gîte tenu par les religieux, un bon point de restauration.  

Quand un marcheur emprunte un chemin de Compostelle, quel que soit son positionnement philosophique et/ou religieux, se déclenche un enchainement qui le pousse à aller sur d’autres voies de pèlerinage. Mieux encore : il lui arrive même de refaire un même parcours, comme s’il n’avait pas complètement fini d’embrasser telle ou telle partie historique. Comme s’il y avait à confirmer ce qu’il avait (re)découvert en lui, et comme s’il était indispensable de poursuivre ses recherches dans les relations avec les autres. C’est ainsi qu’après avoir fait la voie du Puy en 2 011 (du Puy-en-Velay à Santiago de Compostelle), et donc la partie espagnole de cette voie appelée le Camino Francés, j’ai refait en 2 014 et en 2 018 cette même partie espagnole qui est la plus fréquentée par les pèlerins du monde entier. Entre-temps, j’ai aussi apprécié la voie d’Arles, qui se termine en Espagne à Puente la Reina, avec ce beau passage des Pyrénées par le col du Somport.

Mais je viens ici vous parler d’une autre voie de Compostelle bien campée dans l’Histoire, celle qui va de Vézelay à Saint-Jean-Pied-de-Port dans les Pyrénées, que j’ai faite en mai-juin 2 015. Avec toujours la redécouverte de la magie du chemin.