mercredi 28 août 2019


Étape 7 : Chârost, 25km : samedi 23 mai 2 015



Photo : Arrivée à Chârost (« Châro » : le s ne se prononce pas).



Une étape intéressante :

            La sortie de Bourges s'est finalement révélée plus simple que je ne le craignais à la reconnaissance de la veille - je suis même tombé un peu plus loin sur une boulangerie où j'ai pu faire mon ravitaillement, vivement conseillé dans une étape en pleine campagne. Les indications de mon livre collent bien pour s’approcher de la D16 où des pistes gazonnées rassurent les marcheurs qui l'empruntent. Cette départementale m'a conduit jusqu'à la Chapelle-Saint-Ursin.

            Ce fut ensuite des passages dans de jolis bois par des petites routes de campagne où j'ai réentendu « mon coucou », les paysages de la dernière étape, surtout à l'approche de l'agglomération de Bourges, ne lui convenaient certainement pas. J'ai suivi le balisage jusqu'à Villeneuve-sur-Cher. Et ce n'est que dans la fin du parcours que j'ai quitté le chemin balisé pour reprendre la D 16 et m'approcher de l'arrivée. Je suis entré dans Chârost par une petite variante que j'ai prise à un carrefour.            De belles petites routes, de grands carrefours aménagés, et pratiquement aucune voiture. J'étais vraiment tout seul dans cette campagne. J'avais tout mon temps, et j'ai apprécié le calme et la beauté des lieux. Quant à y vivre en permanence, c'est une autre histoire.



Le gîte municipal :

            Je me suis avancé dans ce village par la départementale, qui en est la rue principale, à la recherche d'une personne pour me renseigner (voir photo : le château de Chârost, XIe siècle).
  1. Mon but était la rue des Fossés où se trouve le gîte municipal. Une passante m'a dit de tourner à gauche à la prochaine, et ensuite à droite un peu plus bas. N'ayant rien trouvé, je suis remonté par une autre petite rue et j'ai vu par la porte d'entrée grande ouverte sur la cour d'un bâtiment des ouvriers boulangers facilement reconnaissables à leurs tenues. Je les ai interpellés, l'un d'entre eux est venu me voir et m'a donné les bons renseignements : Il fallait descendre encore plus dans la rue empruntée avant, passer une ancienne porte de la ville et tourner ensuite à droite. Et j'ai dû aller assez loin dans cette rue pour trouver le N° 111. C'était le grand silence dans ce quartier, à se demander si les gens étaient vraiment dans leurs maisons ce jour-là.

            Au 111 se trouve un grand bâtiment, style vieille demeure bourgeoise – j'ai compris un peu plus tard qu'il fait aujourd’hui partie d'un ensemble scolaire ; j'ai poussé le vieux portail en fer qui grince au point que je me suis retourné pour voir si quelqu'un dans les environs me regardait, mais je n'ai vu personne ; j'avais un peu l'air d'être en infraction, il n'y avait pas âme qui vive dans les environs. Je suis entré dans la cour et j'ai vu la vieille porte en bois de couleur verte, plus ou moins décolorée et abîmée par le temps, comme elle m'a été décrite, et, en m'approchant, le petit dispositif à code. J'ai tapé le code, et j'ai réussi du premier coup à ouvrir cette porte. J'ai continué à suivre les instructions : je suis allé jusqu'au fond du couloir, mais je n'ai pas trouvé tout de suite l’endroit où se trouve la clé de mon domaine d’aujourd’hui. Je suis monté à l'étage par un large escalier, et j'étais sur le point d'ouvrir une porte, n'ayant pas vu tout de suite l'écriteau « La Directrice », quand j'ai aperçu une coquille sur celle d'à côté. C'était bien ce qui m'avait été indiqué. J'étais à mon gîte.

            C'est un petit appartement qui a été transformé en hébergement pour les pèlerins. La chambre du fond est devenue un petit dortoir (2 x 2 lits superposés) ; une petite pièce a été réaménagée pour les sanitaires et une autre en un petit magasin avec des provisions où les prix sont affichés sur les boîtes et les bocaux, un petit approvisionnement pour ceux qui n'auraient pas eu le temps de faire des achats ; et la cuisine au fond sur toute la largeur de l'appartement. Et j'avais tout cet ensemble à ma disposition ! Royal ! Du moins s'il ne se présentait pas d'autres pèlerins avant la nuit. Le lendemain matin, avant de partir, j'ai déposé ma contribution dans la boîte qui se trouve dans la cuisine et je me suis enregistré sur le cahier à la disposition des pèlerins de passage.



Une première pratique d'une serrure à code :

            Après mon installation au gîte, comme d'habitude j'ai décidé d’aller faire un tour à la rue principale ; cette zone est à mon sens le centre du village. J'ai appliqué la procédure pour le cas où un autre pèlerin aurait programmé de faire halte à Chârost : fermer le local au premier, remettre la clé au bon endroit au pied de l'escalier, et ouvrir la vieille porte en bois qui, après vérification, se referme toute seule, serrure enclenchée – par précaution j'ai pris soin d'avoir sur moi le code d'accès, la mémoire peut jouer parfois des tours, et, pour employer une expression créole, je ne pouvais pas prendre le risque de « m'enfermer dehors ». La porte étant très vieille, je ne savais pas vraiment si la serrure s'enclenchait automatiquement, j'ai dû vérifier en tournant la poignée en plusieurs fois pour savoir si elle était bien verrouillée. J'ai eu deux autres pratiques de serrure à code sur mon chemin, et toutes les deux ne furent pas totalement concluantes au premier essai : au gîte municipal de Saint-Léonard-de-Noblat, 16e étape, et au gîte municipal de Bazas, la 28e, mais à la différence que dans ces deux derniers cas, je n'étais plus tout seul.

            Après avoir reparcouru la rue des Fossés, j'ai vu un homme qui se baladait dans les environs de la mairie, je suis allé lui demander s'il n'y avait pas une permanence sur place. Je voulais savoir si des arrivées de pèlerins au gîte pour la journée avaient été enregistrées. C'était un samedi et la mairie était bel et bien fermée. Je suis alors remonté à la rue principale ; j'ai repéré la boulangerie, et, en passant, j'ai vu l'enseigne d'un bar de l'autre côté de la rue. Je suis allé y faire un tour, mais sans rien attendre de plus qu'une bière – j'avais mon ravitaillement puisque mon guide le conseillait vivement pour Chârost. 

            Au retour, en milieu d'après-midi, je n'ai pas rencontré la moindre personne dans la rue, mais la surprise est que j'ai dû me reprendre à deux fois pour ouvrir la porte, un peu comme si je manquais de coordination entre l'enregistrement du code et la pression sur la poignée de la porte. Si bien que le soir, en sortant à nouveau du gîte pour aller manger au centre-ville, j'ai mis en place un autre dispositif : je n'ai pas vraiment fermé la porte, je l'ai simplement poussée, j'ai coincé une toute petite pierre entre les deux battants, après m'être assuré que de la rue un passant ne pouvait pas voir qu'elle n'était pas complètement fermée, et j'ai bien repoussé la porte en fer qui donne sur cette rue. Avec une petite appréhension au retour, en tout début de nuit, vite effacée quand j'ai vu que tout était en place, qu'il n'y avait donc eu aucune intrusion… et aucune autre arrivée de pèlerin. J'étais dans mon royaume ! Cela m'a fait penser au gîte de Brécy, mais ici cet hébergement municipal est de meilleure qualité.



Un bar-restaurant à Chârost :

            À ma première entrée dans la salle, à mon arrivée au village et après la douche, deux clients discutaient au bar devant leurs verres ; un autre, non loin, à une table, calé derrière sa bouteille de rosé, participait aussi aux échanges ; et de l'autre côté du bar une femme d'origine asiatique intervenait de temps à autre avec ses clients tout en faisant son travail. Je n'avais pas encore dit un mot qu'elle avait engagé la conversation : vous êtes un pèlerin ; je vous ai vu passer tout à l'heure, me dit-elle ; je visitais un peu le coin, lui ai-je répondu. Et j'ai ajouté, pour en venir à l'essentiel : Une bière s'il vous plaît, et un sandwich si possible. Il n'a pas fallu davantage pour qu'une longue conversation s'engage – j'avais commis un impair au départ quand je lui ai demandé si elle était d'origine vietnamienne. Elle avait un léger accent, mais parlait bien le français. Je suis cambodgienne, m'a-t-elle dit aussitôt, d'un air un peu pincé, tout en articulant bien ; puis, prenant son temps pour s'expliquer : j'ai quitté mon pays à l'âge de 15 ans pour fuir la guerre ; j'ai refait ma vie en France, ma famille y réside, et depuis quelque temps je m'occupe ici. C'était une gaffe ; je sais bien que ces deux pays voisins de la péninsule indochinoise que sont le Cambodge et le Vietnam n'ont jamais eu de très bonnes relations. Mais elle ne m'en a pas tenu rigueur, elle s'est tout de suite intéressée à ma qualité de Réunionnais quand je lui ai présenté les différentes composantes du métissage de la population de l'île venant des quatre coins du globe, et ce dès le début du peuplement de cette île – le Réunionnais est un métis. La conversation se faisait à voix haute, et même le pilier de bar prenait naturellement sa part, et surtout voulait comprendre ce qui m'avait poussé à faire le chemin de Compostelle.

            La patronne de l'établissement m'a vite convaincu qu'elle avait l'habitude de se mettre facilement au service des pèlerins. Elle entendait être concrète, efficace : votre sandwich, vous le voulez à quoi ? Et ce soir vous voulez manger quoi ? Et de me proposer 2 à 3 préparations possibles pour elle ! Charmante, accueillante, vraiment intéressante ! Un peu plus tard, elle a pris une enveloppe épinglée au-dessus du bar pour me raconter, sans entrer dans les détails, l'histoire d'une pèlerine passée chez elle – et qui vraisemblablement avait peu de moyens, et qui lui a laissé un dessin, fait pendant le repas qui lui a été servi.

            En sortant de ce bar, dans le milieu de l'après-midi, j'étais vraiment content, tout se déroulait bien : physiquement je n'avais plus de problème ; je savais qu'un bon repas était prévu pour le soir, et aussi un petit déjeuner tôt avant le départ, le lendemain. Tout avait été négocié : j'avais un bon gîte pour moi tout seul – si tant est que je ne trouvasse point d'autres pèlerins au retour du bar-restaurant. Et mieux : toujours dans le Berry, je n'avais pas de connexion à mon portable, la patronne m'a passé son téléphone, et j'ai pu ainsi réserver une place dans une chambre d'hôtes à Neuvy-Pailloux, ma prochaine étape.

            Tout était vraiment au mieux ! J'avais réussi ma première semaine de marche. Et je commençais à me dire qu'il n'y avait pas de raison pour que je n'aille pas jusqu'à Saint-Jean-Pied-de-Port, dans les Pyrénées, le terme du « Vézelay ».

jeudi 22 août 2019


Étape 6 : Bourges, ̴20 km : vendredi 22 mai 2 015



Photo : La cathédrale de Bourges : Je suis devant le portail principal qui porte le tympan du « Jugement dernier ».

Résumé de l'étape :

            Je m'étais dit au départ que je ne ferai plus de chemins en pleine campagne si le balisage est correct ; l'étape étant petite, mais un coup d'œil sur mon plan m'a fait comprendre que je ne pouvais pas faire autrement, dans une grande partie du parcours, qu'emprunter des départementales balisées, d'après le guide Lepère. Et, bien entendu, pour finir je comptais utiliser l'ancienne voie romaine pour entrer dans Bourges. Mais j'ai raté un petit chemin herbeux un plus loin que Sainte-Solange et je suis passé par la zone industrielle proche de cette ville, qui n'a bien sûr rien à voir en ce qui concerne l'importance avec celle de Burgos que j'ai toujours contournée sur le Camino Francés. Bien qu'il n'y ait pas de balise, je n'ai eu aucun problème d'orientation, la cathédrale étant sur une hauteur à l'approche du final.

            Mon hébergement est un vieil hôtel, un bon point d'appui au départ de la visite du centre-ville. Bourges mérite largement un deuxième passage dans l'avenir.

Se préparer à partir :

            Il y en a pour qui la préparation avant se lancer sur le chemin de bon matin ne pose aucun problème : ils sautent du lit, ramassent à la va-vite leurs affaires et les fourrent dans le sac-à-dos, font un passage ultra rapide à la salle de bains, enfilent leurs chaussures et quittent le gîte sans se poser des questions. Pour moi, c’est tout autre chose : je dois recomposer mon sac après avoir remis ma tenue de marche, ranger dans un sac plastique bien refermé mes vêtements de séjour en fin d’étape, idem pour ce j’aurais lavé la veille, masser soigneusement mes pieds à l’arnica, remplir mes gourdes d’eau pour le trajet, et aussi manger un petit biscuit s’il n’y a pas de bar-restaurant ouvert assez tôt dans le coin pour prendre un petit déjeuner – au départ de cette étape de Bourges, tôt le matin, je savais que je pouvais compter sur celui de Claudette. Le pèlerin réunionnais n’a pas de base arrière à rejoindre en cas de problèmes matériels, même s’il peut avoir un petit point d’appui en France métropolitaine. Avec son sac, il doit tenir un peu plus d’un mois avant le retour dans son île, en organisant une rotation entre les vêtements de marche et ceux pour le gîte – la tenue de voyage est gardée soigneusement au propre pour le retour à la maison, en train et en avion.  Et chaque groupe étant toujours composé d’un pantacourt, d’un T-Shirt et une polaire, toujours en dry (sans oublier chaussettes et sous-vêtements). La gestion du sac-à-dos est un ré-apprentissage important pendant les étapes d’un Compostelle. De toutes façons, quel que soit le système retenu, et quelle que soit l’apparence extérieure, le pèlerin est toujours respecté, parce que tous savent que les différents efforts déployés pour réussir pleinement un projet sont importants et constants. Le pèlerinage, au-delà de l’aspect purement intérieur et/ou religieux, est bien un reformatage général du marcheur.

            Mais avant de partir, il fallait faire la toilette au rez-de-chaussée, remonter à l’étage et s’équiper pour quitter ce refuge de Brécy. Avec ouvertures et fermetures à clé d’un certain nombre de portes. Et en s’assurant que tout a été correctement remis en place avant d’aller au café de Claudette, parce qu’au rez-de-chaussée, il y a divers matériels et équipements à garder en sécurité. Le pèlerin de passage ici a une responsabilité particulière.

Une étape toute simple, mais un raté sur le parcours :

            Après un bon petit déjeuner « Chez Claudette », à qui j’ai remis les clefs du refuge, je n'avais qu'à tourner à gauche en sortant du bar-restaurant, et à prendre la D 52 direction Sainte-Solange. Un parcours facile, sous le soleil, comme pour toute l'étape d'ailleurs ! Les points de repère annoncés dans le livre guide sont bien sur le chemin. Et c'est dans Sainte-Solange que j'ai eu une bonne connexion pour mon téléphone, l'occasion de faire une réservation non seulement pour Bourges, un petit hôtel dont les coordonnées sont dans mon guide, d'un prix acceptable, mais aussi pour Chârost, l'étape suivante. À noter que pour cette dernière, l'employée de la mairie m'a même donné au téléphone l'adresse et le code de la porte d'entrée du gîte municipal. De ce côté-là, tout était réglé. Il ne me restait plus qu'à rallier bien plus loin l'ancienne voie romaine et entrer dans Bourges. Mais j'ai raté le balisage dans les environs d'un petit fleuve, le Colin, j'ai alors poursuivi sur la départementale jusqu'à Saint-Germain-du-Puy, ce qui fait que je ne suis pas passé par cette ancienne voie romaine et que je suis allé plus directement à Bourges.
(

            J'ai été alors obligé de reprendre la N 151, avec la satisfaction de voir que dans cette portion il y a des allées assez bien protégées de la circulation, ce qui fait que j'ai débouché rapidement dans la zone commerciale de cette grande ville d'où la cathédrale est déjà bien visible, dominant même la campagne berrichonne.
Il ne me restait plus qu'à plonger dans la zone urbaine et à remonter vers le centre-ville, sans avoir vu la moindre balise, bien entendu, vu le raté précédent. Et ce fut encore une journée où je n'ai pas rencontré un seul « sac-à-dos » – ce qui ne me préoccupait pas vraiment : marcher avec soi-même est aussi apaisant ! Quoiqu’il soit appréciable aussi de temps à autre de cheminer avec ceux qui ont l’art de faire rire en toutes circonstances - voir ci-dessous Georges Rivière, à droite de la photo, sur la voie du Puy en octobre 2 012.

La cathédrale Saint-Etienne de Bourges :

            Je suis donc arrivé par la rue qui débouche sur l'arrière de la cathédrale (voir photo), et j'ai été tout de suite impressionné par l'immense navire de pierre qui se détache des alentours. J'ai donc contourné cet édifice, pour mieux me rendre compte de la grandeur de la place qui l'entoure.

            Face à l’entrée principale, j'ai été frappé tout de suite par les cinq portails, chacun ayant un tympan, le plus important, au centre, étant celui du Jugement dernier. J'ai pris un certain plaisir à me placer aussi sous les petits portails.


            Je ne suis pas entré tout de suite dans cet édifice, je réservais la visite intérieure pour la 2e partie de l'après-midi, il fallait avant tout que je me rende à mon hôtel, bien situé sur le plan de mon guide.

            En quittant la place de la cathédrale par le côté sud, je suis tombé sur l’office du tourisme de la ville (voir photo, et photo), et j'ai préféré y entrer de façon à avoir des repères précis. C'était aussi l'occasion de prendre rapidement quelques photos de la place où se trouvent plusieurs points de restauration. L'accueil à l’office est très sympathique, et une employée m'a remis une carte détaillée en pointant le cheminement le plus rapide pour rejoindre mon hébergement. Il n'y avait qu'à descendre une rue et tout à fait en bas à tourner à gauche – j'ai vu dans le quartier d'autres hôtels mais de catégories bien supérieures.

Un vieil mais sympathique établissement :

            Mon point d’appui pour cette étape est un vieil établissement : la clientèle que j'ai découverte en arrivant sur la partie terrasse – une occupation partielle du trottoir – n'était pas du tout du même genre que celle des autres endroits du quartier. Je l'ai perçue à mon entrée comme disons plus populaire. Il y avait encore des gens qui mangeaient à l'intérieur de la salle. La dame qui m'a accueilli est très gentille, c’est elle qui prend l’initiative des premiers contacts ; elle n'a pas tardé à m'emmener à ma chambre, à l'étage, et à me montrer en passant le WC dans l'escalier – un peu plus tard, j’ai pu m'imaginer les difficultés que pourraient avoir des clients de fortes corpulences à manœuvrer dans un si petit espace en cas d’urgence intestinal. Et aussi la douche sur le palier, un point que mon guide annonce dans sa présentation des gîtes à Bourges. Je n'ai jamais vu ce type de douche : tout se passe dans un gros cylindre surélevé au milieu d'une petite pièce, d'où l'importance de refermer correctement la petite entrée avant de commencer à manoeuvrer.

            Mais tout est opérationnel, y compris le petit lavabo dans la chambre, à condition de ne pas ouvrir trop grand le robinet qui lui est vraiment d'un autre âge. J'ai trouvé rapidement le sommeil sur le petit lit, quoique j'aie remarqué au premier contact que le matelas n'est pas souvent retourné parce qu'il penche d'un côté. Je n'ai pas été dérangé dans mon sommeil, la fenêtre isole parfaitement la chambre des bruits de la rue. Tout est bien propre ; les différentes couches de peinture appliquées se voient bien sur les boiseries. Cette chambre a dû voir passer pas mal de générations de voyageurs et de pèlerins.

            Avant d'aller faire la visite de la ville, j'ai pu manger un sandwich sur place ; mais la dame, prévenante, m'a précisé qu'il n'y a pas de restauration le soir, avant d'ajouter : je pourrais quand même vous servir qu'un petit quelque chose de chaud comme des lasagnes, par exemple, et une part de gâteau. Je lui ai tout de suite dit que cela me convenait parfaitement. Et c'est ce que j'ai mangé avec plaisir au retour de ma courte visite de la ville.

Une petite visite au centre-ville :

            J'ai vu beaucoup de touristes à la cathédrale – Bourges est célèbre aussi par son festival annuel de musique –, mais il n'y en avait pas de vraiment plongés dans la prière, eussent-ils suffisamment de temps à leur disposition… Ce jour-là, parmi tous ces gens, je ne crois pas qu'il y ait eu beaucoup de Berruyers. Il est vrai que ce n'était pas une période de grandes cérémonies religieuses... et il appartient à chacun de choisir ses moments de prière, et à d'autres d'établir à leur façon leurs relations avec Dieu.

            Mais pendant la visite de ce lieu prestigieux se dégage un sentiment de force et même temps de tranquillité, et aussi l'impression que le temps ici ne compte pas. La réalité fait que, même en regardant le portail principal et le tympan du « Jugement dernier » (voir photo), qui se retrouve aussi à la cathédrale de Conques sur la voie du Puy-en-Velay, les préoccupations essentielles sont d'un autre ordre. Il y a tout lieu de croire que peu de visiteurs prennent en considération ce qu'annonce la Bible à ce sujet : la résurrection des morts précédera le Jugement dernier de Dieu ; ceux qui ont fait le bien ressusciteront pour la vie, et ceux qui ont fait le mal seront dans la damnation éternelle. Et, pourtant, la beauté, la grandeur et la richesse de cet ensemble architecturale assurent à tous un accueil grandiose dans cette maison qui éveille au minimum l'existence d'un esprit créateur supérieur (voir photo, photo, photo et photo).

            En sortant de la cathédrale, j'ai vu le petit train assurant les visites (voir photo) – c'est un excellent moyen pour une première approche de la découverte d'une ville chargée d'histoire, mais je n'avais pas beaucoup de temps à ma disposition ce vendredi 22 mai 2 015. Je me suis rendu compte aussi que dans tout le quartier le regard ne quitte pas longtemps la cathédrale (voir photo).

            Je pensais avoir un wi-fi de qualité à l'office du tourisme, mais tel ne fut pas le cas ; alors qu'il serait si simple de laisser automatiquement se connecter tous ceux qui franchissent la porte, malheureusement, comme dans beaucoup de lieux publics, il faut avancer des données personnelles dans plusieurs fenêtres sur son portable, parce que c'est un site qui prend en charge les visiteurs, et que sans doute établir des statistiques à partir des listes de contacts passe avant la hauteur de la connexion et l’immédiateté dans l'utilisation de l'outil.

            Je suis allé vérifier comment sortir de la ville pour l'étape suivante, le Lepère indique clairement les rues à suivre, mais les balises sont quelque peu espacées sur certains tronçons et ne collent pas exactement aux préconisations à certains carrefours. Mais l'essentiel a été fait !


lundi 19 août 2019


Étape 5 : Brécy, 19 km : jeudi 21 mai 2 015 – voir la carte.



Photo : Le bar-restaurant de Claudette, au centre de Brécy.



Résumé :

            « Couy - Brécy » est une petite étape, sans aucune grande difficulté, à travers des champs et des bois. Je l'ai effectuée sous un beau soleil, mais il faisait froid. Deux agglomérations traversées : Baugy et Villabon. Le passage le plus souvent par des départementales s'est imposé presque naturellement – il n'y a pas de grande circulation sur ces routes.

            Ce qui a fait le charme de cette étape, c'est mon arrivée à Brécy, et la découverte, à mon sens et pour le peu de temps que j'y ai passé, d'un lieu de vie caractérisé dans cette campagne du Berry : le bar-restaurant de Claudette. C'est cette dernière qui gère en quelque sorte les clés du foyer rural, un espace à l’étage du bâtiment où 4 places sont à la disposition des pèlerins.



Un itinéraire simple et rapide :

            Le soleil était au rendez-vous ce matin-là à Couy, mais le froid piquait au départ. La responsable de mon hébergement m'a conseillé de reprendre le chemin par où j'étais arrivé la veille et de partir à gauche à la prochaine intersection : le balisage est là et il vous sera facile d'emprunter la D53, m'a-t-elle dit. Mon plan indiquant un chemin dans la campagne pratiquement parallèle à la D53 et à la D10, j'ai pris ces départementales pour rallier Baugy. Ensuite, le balisage colle à la D12, jusqu'à Villabon, et continue ensuite dans une belle et dense forêt où la circulation n'est pas intense – il y a même de jolies plantes sur les bas-côtés.


            Quand j'étais dans ces bois, tous mes sens étaient en éveil. Mais pour une fois j'ai trouvé cette traversée plutôt reposante.

            J'ai repris une autre départementale qui m'a mené à un carrefour où passe la N151, que j'ai traversée sans problème, et je suis allé ensuite directement à Brécy. Presque étonné de me retrouver dans une petite ville en pleine campagne !

            Il y a de belles maisons dans cette petite agglomération ; en cette fin de matinée, il n'y avait pas grand monde dans la rue principale. Mon objectif était de repérer le bar-restaurant de Claudette (voir photo) où je devais retirer les clés du foyer rural, un hébergement des plus simples qui fonctionne depuis des années où j'avais prévu de me loger.



Le bar-restaurant de Claudette, un centre de vie du village :

            Je n'ai pas eu à le chercher, la rue qui mène à la place centrale débouche directement dans ce lieu, et le positionnement de la maison fait que le regard y est automatiquement attiré. Il était un peu plus de 13 heures, et en y entrant, j'ai été surpris de voir la grande salle encore pleine de clients : des travailleurs de toutes catégories, attablés, en individuel mais aussi en groupe. Tout ce monde du travail mangeait d'un bel appétit ; sur chaque petite table trônait une bouteille de vin, et qui s'interpellait. Tout le monde parlait un peu à tout le monde, il y avait une bonne ambiance dans la salle.

            Claudette, une femme débordante d'activités, semblait bien être au four et au moulin, échangeant un mot avec les uns et les autres quand elle passait entre les tables, lançant des ordres aux divers personnels de service : elle était à la caisse et servait aussi en salle, bien que deux autres personnels attachés à divers services fussent aussi de la partie ; elle tenait aussi le tabac de l'établissement quand se présentaient des clients intéressés, et faisait aussi quelques va-et-vient salle à manger cuisine.

            J'ai eu un peu de peine à trouver une petite place dans un coin pour déposer mon sac-à-dos et mes bâtons, et pendant quelques instants j'ai hésité à interpeller la maitresse des lieux. Mais elle m'avait vite repéré, et du regard, elle m'a fait signe de m'approcher du bar. Je l'avais eue au téléphone la veille pour lui prévenir de mon arrivée.

            Je n’avais pas fini de me présenter qu'elle m'avait donné les clés du foyer rural, tout en me disant : c'est sur votre droite, à 100 m d'ici, près des pompiers ; il faut prendre un escalier extérieur pour monter au dortoir. Et elle avait ajouté : une dame aussi doit venir ! Pour enchainer : vous mangez tout de suite ? Non, lui ai-je répondu. Après la douche, je passerai prendre un sandwich. À tout à l'heure, m'a-t-elle dit encore.



La découverte de mon hébergement :

            Je n'ai eu aucune difficulté à trouver le foyer rural. Dans les clés que Claudette m'a remises, une ouvrait les solides portes vitrées des deux entrées au rez-de-chaussée. Une bonne serrure, sans problème – si j'en parle, c'est parce que j'aurai l'occasion de revenir sur les serrures des portes des gîtes. J'ai visité tout le bas de l'édifice : près de l'entrée, un coin cuisine à gauche et des sanitaires à droite ; un peu plus loin, à un niveau légèrement inférieur un large espace pour des activités sportives ; au fond se trouve une scène, et sur les côtés de la salle des chaises pliantes pour les spectacles.

            J'ai ouvert et refermé toutes les portes donnant sur l'extérieur, si bien que je craignais qu'un bon citoyen du coin ne pût s'empêcher de me prendre pour un cambrioleur. Mais je ne trouvais toujours pas d'escalier donnant accès à l'étage, qui est seulement sur le devant de la structure. J'ai fait le tour du bâtiment. J'étais sur le point de retourner voir Claudette, mais par amour-propre, je me suis dit qu'il fallait inspecter méthodiquement cette bâtisse – il ne peut pas y avoir d'escalier secret dans un espace public. Du côté du petit jardin, j'ai découvert une autre porte qui ne s'ouvre qu'avec la 2e clé, et qui donne accès à un escalier très étroit et à pic. En le prenant, je suis arrivé à une première petite pièce à l'étage qui s'ouvre elle-même sur une autre salle en longueur servant de dortoir. Ce dortoir est meublé d'une table et de quatre chaises, d'une armoire, d'un petit meuble, et de 2 lits – je n'ai découvert qu'un peu plus tard 2 autres lits pliants rangés dans un coin. J'ai pris celui où il y avait déjà une autre chaise faisant fonction de table de nuit où je pouvais déposer des affaires. Ce qui ne m'a pas empêché d'en prendre une 2e en soirée quand j'ai compris que je serai tout seul dans cet espace.

            Ce n'est que le lendemain matin, alors qu'il était encore trop tôt pour aller prendre le petit-déjeuner chez Claudette, que j'ai découvert sur le meuble bureau un dossier d'enregistrement des passages, où j'ai mis une petite appréciation – généralement je ne fais que souligner les points positifs de l'hébergement – et la boîte donativo. Je suis toujours réglo : connaissant les difficultés des petites communes à entretenir de tel gîte pour les pèlerins, je mets toujours 10 €, à peu près à la hauteur du prix dans un gîte municipal où un hospitalier enregistre les arrivées et encaisse l'argent du séjour.



De la bonne bouffe chez Claudette, et pour pas cher !

            Après mon installation et un passage à la douche au rez-de-chaussée, ce qui implique qu'il faille s'habiller pour y aller et retourner au dortoir et donc passer obligatoirement dans la rue principale du village, je suis allé prendre un sandwich « Chez Claudette ». Les têtes du midi n'étaient plus là, bien entendu, mais il y avait encore une bonne circulation de clients dans la salle principale : le travailleur du coin qui passe boire un verre rapidos ; le fumeur qui vient s'acheter des cigarettes ; et, bien entendu, un ou deux « piliers plantés au bar » qui participaient d'une certaine manière à l'accueil puisque toute personne qui entrait leur adressait un petit mot... c'est dire s'ils étaient connus à ce poste.

            J'étais à peine assis qu'un jeune serveur est venu prendre ma commande, et peu de temps après j'attaquais un gros classique pour lequel la maison ne mégotte ni sur le jambon ni sur le fromage. Même en dehors des repas, il y avait une vraie ambiance dans cet établissement. Claudette est venue me demander si tout allait bien ; je lui ai fait part de ma surprise en constatant que dans presque tout le village, j'avais des difficultés à avoir une connexion téléphonique ou Internet. C'est un peu pareil dans tout le département, nous sommes dans le Berry, un des plus vieux terroirs agricoles de France, m’a-t-elle répondu en levant les bras au ciel ; mais, sur la place en face de chez moi, il y a une petite zone où la connexion est un peu meilleure à certains moments de la journée, m'a-t-elle dit encore. Ce n'était pas faux, mais encore insuffisant pour ce que j'avais à faire. J'en ai tout de suite tiré une conclusion : demain, ce sera la première fois que je prendrai un départ sans avoir réservé une place dans un gîte pour le soir ; mais comme c'était pour Bourges, une grande ville, j'avais toutes les chances de régler le problème pendant la marche au cours de la journée ; en chemin, je finirai bien par trouver un coin où le téléphone « passe bien ».

            Le soir, j'ai eu un bon dîner ; et du moment qu'un client s'asseyait pour manger, le serveur déposait tout de suite une bouteille de vin sur sa table. La clientèle n'était plus tout à fait la même : c'étaient plus des familles qui venaient manger, le bar était toujours bien occupé par des travailleurs qui passaient prendre l'apéritif avant de retourner chez eux. Mais j'ai retenu la bonne ambiance, et surtout l'impression que je faisais partie du village, que j'étais intégré à ce lieu de vie, et, pourtant j'étais toujours en habit de marcheur : pantacourt, T-shirt et polaire, et que mon chapeau était bien visible à côté de moi. Et c'est dans une certaine sérénité, très content de ma journée, que j'ai regagné mon « foyer rural », même après avoir entendu à la radio que la vague de froid devait continuer jusqu'à la semaine prochaine.



Quand la réalité s'impose : une stratégie pour la nuit

            Le début de la nuit allait être plus ou moins agité : la lumière venant des lampadaires de la rue éclairait l’intérieur du petit logement – il n’y avait que des fenêtres vitrées qui l’isolaient de l’extérieur – et me tenait éveillé, sans compter que deux ou trois jeunes ont continué à taper dans le ballon à côté du bâtiment, près du monument aux Morts, jusqu'à 21 H. Et vraisemblablement, après les rencontres, en attendant que leurs parents viennent les chercher en voiture, ils ont continué à s'amuser dans la rue juste en dessous du dortoir. Il n'était pas question de leur faire la moindre remarque, le résultat aurait été à l'opposé de l'attente. J'ai donc utilisé ce temps qu'il me restait avant que le sommeil ne m'attrape pour résoudre un autre problème, plus relax quoique important, qui me faisait même rire par moments sur mon lit : comment descendre de l'étage pour aller faire pipi dans les toilettes au rez-de-chaussée quand il faut au préalable prendre l'escalier, ouvrir et  refermer à clé une première porte, passer par le petit portail du jardin à la rue principale, et ouvrir encore deux portes d'entrée au rez-de-chaussée pour accéder aux toilettes, sans oublier de les refermer derrière moi pour éviter des intrusions. Et ce d'autant que dehors il faisait un froid de canard ! Je m'imaginais habillé comme pour marcher et couvert de mon chapeau, avec en plus mon poncho pour bien m'isoler du froid, et une petite lampe à la main – heureusement il n’a pas plu ce soir-là. Je m'imaginais aussi dans cet accoutrement rencontrer dans la rue un passant qui ne connaissant pas le contexte et qui ne serait que plus intrigué de me voir ouvrir l'entrée principale du foyer. Il aurait donc fallu guetter des deux côtés pour voir si quelqu'un ne débouchait pas en ces lieux. Et ce, à l'aller comme au retour !  J'ai même pensé à la performance à réaliser en cas d'un vrai dérangement intestinal en pleine nuit... Tout peut arriver sur le chemin !
Ils avaient matché sur les espaces sportifs en face du foyer, derrière le monument aux morts et aussi près de l'église.

            J'avais donc tout intérêt à peaufiner ma stratégie avant que le sommeil ne m'engloutisse, quand j'ai vu dans un coin du dortoir un seau. Tout de suite mon esprit a échafaudé un plan B : et si ce sceau en plastique n'était pas destiné au lavage de vêtements ? En effet, il pouvait aussi servir de pot de chambre, ce qui simplifierait la situation, à la condition, bien entendu, de le vider en bas et de le laver correctement le lendemain. Alors, plan A ou plan B ? Je n'ai pas le souvenir d'avoir fait un choix, j'ai tout simplement essayé de préparer une réponse tout à fait détachée pour le cas où Claudette m'aurait subrepticement interrogé à ce sujet le lendemain matin, car je commençais à me glisser dans une nappe de sommeil, tout en essayant d'imaginer ce que d'autres auraient fait à ma place. Quelques-uns de mes amis, même à leurs âges, et pour proches qu'ils soient de l'esprit pèlerin, dans de telles circonstances auraient pu opter pour ce qu'il y a de plus naturel à faire par une des fenêtres donnant sur la rue principale, et peut-être même en chantant ! Il y en a qui ne vieillissent pas !


lundi 12 août 2019


Étape 4 : Couy, 21,5 km : mercredi 20 mai 2 015



Photo : en route pour Couy, sur le pont de la Loire à la Charité-sur-Loire

            Après l'Yonne et la Nièvre, je suis passé au cours de cette étape dans le département du Cher. Et pour ne rien changer, je n'ai vu aucun pèlerin, aucun marcheur. Marcher seul est en fait un gros avantage : il n'y a pas à composer dans un groupe avec les desiderata des uns et des autres, à supporter des humeurs, car la fatigue aidant, chacun laisse épancher maussaderies et fantaisies.

Dans cette étape, ce sont les grands espaces à blé qui dominent, je n'ai pas traversé une seule vraie forêt ; j'ai vu une vraie petite ville animée, Sancergues ; et je n'ai pas eu à gérer des erreurs de parcours – ce n'est qu'à la Sablonnière que je me suis retrouvé dans l'indécision, mais c'est aussi dans ce lieu que j'ai fait une rencontre inattendue : un jeune Réunionnais, collégien, vit à Sancergues ; il avait 6 ans quand sa famille, qui vient de Saint-Joseph à la Réunion, s'est installée en France hexagonale.

Et j'ai été plongé dans la vraie la campagne à mon arrivée, à 1,5 km de Couy.



Le passage de la Loire 

            Il fallait penser à récupérer après deux journées éprouvantes, d'où un découpage donnant une petite étape après la Charité-sur-Loire. Et en partant de cette ville, j'ai ressenti le passage de la Loire comme un véritable événement. Il en sera de même, beaucoup plus loin, pour la Dordogne.

En quittant l'église Notre-Dame, en bas de la ville de la Charité-sur-Loire, j'ai pris la rue du Pont qui mène directement au fleuve. J'ai déjà traversé la Loire (voir photo), en voiture voire en train, mais là c'était à pied et sac au dos, et cela prenait une tout autre dimension. Le grand fleuve, le paysage, le coup d'oeil sur le pont pour bien voir la ville qui s'agrippe à la berge (voir photo), la circulation importante en ce début de matinée, c'était beau ! Et pourtant le temps était bien gris, presque noir par moments, mais je ne sais pas pourquoi j'ai fait le lien avec une phrase célèbre mais sans qu'il y eût aucune comparaison, juste pour la forme : Je suis venu, j'ai vu...et j'ai apprécié – à aucun moment, bien entendu, l'idée de victoire avait effleuré mon esprit, et ce d'autant que je n'étais qu'à la 4e étape de mon périple qui a duré 37 jours et que je n'avais pas encore réglé, dominé, des petits problèmes physiques. Ce passage m'avait en quelque sorte gonflé à bloc, j'attendais une transition par rapport à ce que j'avais vécu les jours précédents.



Sancergues, une petite ville intéressante 

            Après le passage des deux ponts sur la Loire, j'ai utilisé la N151 ; il existe, paraît-il, un chemin balisé en dehors de cette voie, mais pour moi, c'était décidé : la nationale est toute droite jusqu'au prochain village, et de plus une bonne piste parallèle à cette route a été faite. Sur presque 4 km, j'ai marché sur cette piste jusqu’au hameau de l'Étang. En toute sécurité ! Un coup d'oeil sur le plan m'a montré qu'autrement il aurait fallu faire un grand détour dans la campagne.

            À partir de l'Étang, j'ai pris un chemin de terre bien balisé, quelques petits passages boueux mais sans plus, et ce jusqu'à Saint-Martin-des-Champs, où le balisage lui-même reprend la nationale jusqu'à Sancergues. Sancergues est une belle petite ville, bien animée. Pour une fois, j'étais sous un beau soleil qui réchauffait bien l'atmosphère, car il a fait froid depuis mon départ, les trottoirs étaient remplis de monde, et dans les petits groupes stationnés ici ou là les discussions allaient bon train. Je me suis arrêté à l'église, qui est au centre du bourg, la place porte le nom de Saint-Jacques (voir photo). Une dame, qui s'occupe des œuvres de l'église, s’est approchée naturellement pour discuter un peu avec moi, avant de repartir son sac à provisions à la main.



La rencontre avec un jeune Réunionnais

            J'ai continué ensuite dans la rue principale, pour tourner à gauche à une intersection et prendre la D6. Je ne sais pas pourquoi, mais en croisant un homme sur le trottoir j'ai eu l'impression, sans doute par son allure et son teint de métis, qu'il était réunionnais. J'ai failli le lui demander quand je suis arrivé à sa hauteur, mais je me suis retenu. Si seulement il avait prononcé un mot... 200 m plus loin, sur cette départementale, mon livre indique qu'il faut tourner à droite vers la Sablonnière, et après 10 m de nouveau à droite puis à gauche. Le résultat est que dans la rue partant à gauche, une rue qui bordait une cité, il n'y avait aucune balise de confirmation, je l'ai vérifié deux fois. Je suis allé explorer l'autre rue partant de la précédente intersection et ce jusqu'à un collège sur une butte, et je n'ai rien trouvé. Le plan du guide ne donnait rien, je ne savais pas quoi faire.

            C'est alors que j'ai vu un jeune traverser cette rue. Je suis allé lui expliquer ma situation, mais il ne pouvait m'aider en rien. Lui aussi, par le teint, me semblait être un Réunionnais, mais il n'avait pas du tout l'accent du pays. Ma prémonition était toujours présente ! Sa famille habite dans la cité, un peu plus haut ; et tout en l'interrogeant sur son collège à côté, j'ai remonté un peu le chemin qu'il empruntait dans la cité, me disant qu'il fallait vérifier s'il n'y avait pas de balise de ce côté-là. J'ai fini par lui demander : Tu as toujours habité ici ? Je suis ici depuis l'âge de 6 ans, me dit-il. Et avant ? J'étais à la Réunion, me dit-il encore sur le même ton, ma famille est originaire de Saint-Joseph. Extra !          Je ne m'étais pas trompé, je devais rencontrer un Réunionnais aujourd'hui, mais je me suis abstenu de lui demander de décrire son père, sans doute l'homme que j'avais croisé peu de temps auparavant. Et c'est à partir de là que je lui ai dit que j'étais moi aussi de là-bas, précisément de Saint-Paul, et que je faisais le chemin de Vézelay. Il voulait me présenter à sa mère, mais le temps passant, j'avais mon chemin à retrouver. J'ai quitté le jeune Dylan, et je suis reparti dans la première rue que j'avais explorée au départ, et, miracle, j'ai découvert tout à fait en haut d'un poteau de téléphone collé au feuillage d'un arbre une balise, la seule jusqu'au fond de cette rue. Il n'est pas impossible que des jeunes du quartier aient la fâcheuse habitude de retirer tout ce qui est collé à leur portée dans les environs.



Dans les grands espaces plantés de blé

            À partir de cette cité, ce sont des champs de blé, et mon guide annonce un chemin de cailloux qui monte et qui descend. J'ai bien trouvé une petite partie caillouteuse, mais ce fut ensuite un bon chemin de terre bien en herbe ; et pour ce qui est de la descente, ce n'est que bien plus haut, au sommet de la colline que je l'ai trouvée – avant d'y arriver, j'ai failli prendre sur la gauche parce que justement cela descendait un peu. Je comprends bien que dans cette partie, sans une grosse pierre et sans un arbre à portée, il est difficile de bien baliser. Le repérage par rapport à un gros bouquet d'arbres en plein champ au sommet était bon, et j'ai par la suite retrouvé des balises qui m'ont permis d'arriver sur la départementale qui mène à Charentonnay. Mais c'est bon de marcher dans les champs de blé par beau temps (voir photo, photo et photo), même si les pistes sont un peu ravinées par endroits.

            Par cette départementale, je suis arrivé à Charentonnay où j'ai trouvé une belle place avec des bancs et des toilettes publiques – et j'ai commencé à attaquer le sandwich que j'avais emmené.



Couy, un bourg désert sous la pluie et dans le froid

            Et c'est toujours sans avoir rencontré de marcheur que j'ai pris la D72 en direction de Couy. La pluie qui avait menacé en plusieurs fois, me faisant sortir et rentrer mon poncho, a fini par décider de tomber vraiment. Et c'est sous une pluie froide que je suis arrivé à Couy. À ce moment de la journée, c'est un bourg complètement silencieux, je n'ai pas vu un seul passant dans les rues, et la place de l'église était déserte. Je sais que la table d'hôte où j'avais réservé est à plus de 1,5 km de Couy, et hors du chemin, et qu'il me fallait avoir une assez bonne indication pour ne pas risquer d'errer dans la campagne. Je décidais alors de manger le reste de mon sandwich, je ne pouvais alors que m'abriter sous le rebord du toit de l'église, si petit que je devais me plaquer contre le mur pour ne pas me faire mouiller quand la pluie fouettait un peu.

            Mais à un moment, j'ai vu un homme qui sortait d'un petit commerce en face de l'église, qui était fermé jusque-là. Je me suis précipité pour lui demander le chemin de la chambre d'hôtes. Très gentil, l'homme est même sorti de sa voiture, alors qu'il pleuvait toujours, et me montrant de la main : le chemin des pèlerins continue de ce côté-ci, mais vous prenez la route de l'autre côté, et vous allez tout droit. Vous verrez, deux ou trois petites pancartes qui annoncent cet hébergement. Au bout d'une bonne demi-heure, vous verrez un garage sur la gauche, il vous faudra tourner à droite, en face du garage, et vous trouverez facilement après.

            J'ai vu en effet les pancartes, mais je trouvais que le garage se faisait attendre... et la pluie continuait de tomber. Arrivé à une espèce de hangar abritant quelques carcasses de voitures, j'ai tourné à droite et j'ai trouvé un peu plus bas une autre pancarte qui m'invitait à tourner à gauche. J'étais alors à nouveau dans une zone de pleine campagne, mais au bout d'un moment je suis arrivé devant une longère restaurée avec des animaux sur les côtés – l'homme à Couy m'avait bien dit : vous verrez des moutons, des chèvres et d'autres animaux... le portail n'était pas fermé, et je suis entré dans la cour. Il y avait d'autres petits bâtiments restaurés, mais le tout faisait encore bien ferme et campagne. Sous un arbre, des petites chaises métalliques étaient disposées, j'ai descendu mon sac et je me suis assis un moment, mais pas longtemps, car il faisait froid et je n'étais pas à l'abri. Remettant mon sac et mon poncho, j'ai marché un bon moment de long en large devant cette baraque fermée, pendant qu'un petit chien à l'intérieur aboyait régulièrement. Ces aboiements m'avaient rassuré : il y avait bien quelqu'un qui allait revenir ici...



Un sérieux coup de froid, mais un bon dîner

            Ce n'est qu'après une bonne heure que j'ai vu pointer une jeune femme, la fille de la responsable de la table d'hôte. Comme je lui disais que cela faisait un bon bout de temps que j'attendais, elle me répondit gentiment : Oh ! généralement les pèlerins n'arrivent pas avant 16H ! Visiblement elle est à l’aise dans l’accueil ; elle me fit visiter son atelier de poterie et me détailla même ses créations. Elle me proposa ensuite de faire une machine pour mes vêtements à laver, ce que j'ai accepté aussitôt, parce que j'en avais bien besoin, et elle m'installa dans une chambre à l'arrière de la longère. Tout allait bien dans le meilleur des mondes possibles, d'autant qu'un petit soleil avait fait une apparition.

            Un peu plus tard, après la douche et des soins divers, alors que je récupérais mes chaussures laissées à l'extérieur pour profiter du petit soleil, j'ai constaté que la pluie avait refait son apparition, et qu'il faisait encore plus froid. De retour dans la chambre, la sensation du froid se fit tout d’un coup très intense – je suis alors entré dans une phase de « kap-kap » comme on dit en créole, ce tremblement des mâchoires qui est une réaction musculaire pour réchauffer le corps, une thermorégulation naturelle quand la température tombe en dessous de la normale, qui m’a vraiment surpris. J'avais certainement pris froid à l'église et aussi à l'arrivée quand je me suis assis en attendant un responsable du gîte. Je ne me suis pas affolé. J'ai déjà connu cette situation, notamment à l'arrivée d'une étape en Espagne au cours de laquelle j'ai traversé un bel orage dans le vent et le froid en montagne (étape de Belorado à San Juan de Ortega sur le Camino Francés, en 2 014). Et dans ce cas, il faut attaquer tout de suite... et fort ! J'ai pris 1g d'aspirine, en un seul cachet, et je me suis mis au lit dans mon sac à viande, sous la couverture, y ajoutant même une 2e couverture que j’ai chipée sur un autre lit de la chambre, et après avoir programmé le réveil de mon portable, sonnerie prévue à 18H30, question de ne pas rater le repas du soir à 19H. Et j'ai bien dormi ! À mon réveil… j'étais bien ! Quelles que soient la résistance entretenue du pèlerin et la période de l'année où il effectue son périple, il est bon d'avoir dans son sac de quoi passer un tel cap. J’ai aussitôt pensé à la suite de mon projet sur ce Vézelay : Saint-Jean-Pied-de-Port, le terminus, était alors encore à… 34 jours. Une pensée est venue immédiatement à mon esprit : si ce soir, à table, tu trouves bon ce que tu bois et ce que tu manges, c’est que tu n’es pas malade.

            Il était temps d'aller à la salle à manger, au milieu de la longère. J'ai apprécié l'apéritif à base de fruits et de vin offert par la responsable de la maison, et accompagné de petites croquettes. J’avais donc bien surmonté mon coup de froid. Le dîner était parfait, bien arrosé d'un vin du coin plus qu'acceptable, et le dessert maison de qualité ! Totalement oublié mon coup de barre ! Et sur ces bases-là, je ne pouvais que passer une bonne nuit.

N.B : Sur cette dernière partie, particulièrement, j’attends les commentaires de mon ami Pierre-Georges Rivière qui a marché sur la voie du Puy-en-Velay en 2 012 (voir sur la droite de la photo), et qui ne rate jamais une occasion de faire rire la compagnie.

mercredi 7 août 2019



Publication du 08/08/19

Étape 3 : La Charité-sur-Loire, 35 km : mardi 19 mai 2 015



Photo : L'église de la Charité-sur-Loire (département de la Nièvre, en région de Bourgogne).




Résumé :

            Dans cette troisième étape, je n'ai pas vu, ni de près ni de loin, un seul pèlerin, un seul randonneur. Il est vrai qu'à mon départ de Vézelay, une grande majorité du groupe avait pris la variante de Nevers – cette dernière, fût-elle la plus belle, est plus exigeante physiquement. Pour ceux qui, à une heure différente de la mienne, sont partis par celle de Bourges, leurs découpages étaient vraisemblablement différents du mien – d'ailleurs, dès la première étape, beaucoup vont plus loin que Tannay.

            Dans cette 3e étape, à quelque chose près, j'ai suivi l'itinéraire que propose le guide Lepère ; le balisage du GR colle assez souvent aux départementales, et il y a de petits tronçons où réapparaît une signalisation Compostelle. Mais il n'y a pas, le plus souvent, la possibilité de court-circuiter les forêts sur le parcours. À ce propos, les passages dans ces zones ont été plus sécurisants, j'ai pu faire en plusieurs fois des vérifications avec ma boussole, et aussi par Internet, pour vérifier que j'étais dans la bonne direction. J’avais bien retenu les enseignements de l’étape de la veille.

            Pour mieux suivre le plan et les préconisations du Lepère, j'ai déchiré les pages correspondant à cette étape pour les avoir à portée de la main, le livre restant dans mon sac, et je les ai mises dans ma poche ; ces indications sont convenables sur cette étape, avec toutefois des imprécisions en certains endroits.

            Je n'ai pas vu la Charité-sur-Loire sous un beau soleil. Qu'est-ce que j'aurais voulu me retrouver par beau temps sur ce pont au-dessus de la Loire (voir photo) ! Je comprends que c'était une des haltes les plus importantes sur la Via Lemovicensis à une certaine époque.

            À mon arrivée, tout à fait en haut de cette ville, et après mon installation dans un petit hôtel, il m'a fallu faire un tour en ville pour trouver une pharmacie et prendre quelques photos de l'église. Cette ville mérite que les pèlerins consacrent un peu plus de leur temps à la visiter.

Le lendemain matin, même après 8H, le ciel était toujours d'un gris foncé, je n'ai donc pas eu de belles photos de ce lieu. Si dans l'avenir, j'ai l'occasion de passer en Bourgogne, je reviendrai à la Charité-sur-Loire. Les bords de la Loire: voir photo et photo.



Un bon départ de Champlemy :

            Il n'était pas loin de 8H quand j'ai quitté la chambre d'hôtes de Champlemy ; j'étais bien, un bon pansement à mon pouce. La première chose avant de prendre le chemin était de passer dans le magasin d'alimentation d'en face : j'ai pris du pain, du jambon et un fruit. J'ai pris ensuite le balisage sur la D127 qui traverse la place du village, j'ai tourné à droite puis à gauche, mais, un peu plus loin, alors j'étais encore dans le bourg, il n'y avait plus de balise. J'ai même fait un retour sur mes pas, car une erreur dès le départ peut se payer cher. Mais j'avais compris que le détour menait finalement à un rond-point sur cette départementale. En revanche, je suis resté sur cette même route quand le balisage me poussait à passer dans les champs, parce que, sur le guide, ce même balisage ramène plus loin sur cette voie, pour peu que les pèlerins engagés ne s'égarent pas.



Une première forêt :

            Ce fut donc ensuite 4 km dans une zone forestière, pour tourner à gauche au carrefour de Bourras en direction de l'ancienne Abbaye – le paysage dans cette partie est magnifique – puis passer sur la D117 et entrer dans une forêt après avoir franchi une barrière. Ensuite, c'est pratiquement tout droit par des allées forestières qui descendent et un balisage à peu près correct : le blanc et le rouge du GR, mais aussi des petites balises de Compostelle par-ci, par-là.

Quand j'étais en forêt, je ne pouvais pas m'empêcher de regarder au loin de façon à anticiper la fin de cette piste, le souvenir de l'étape d'hier était encore bien présent dans ma tête. C'est que la voie que j'empruntais rencontre régulièrement d'autres chemins forestiers. Mais je me rassurais en vérifiant avec ma boussole que j'étais dans la bonne direction, car le plan indique pratiquement un sud-ouest constant sur bien plus d’un kilomètre.

            Puis ce fut une zone de bois et de pâtures, de petits champs, avant un vrai changement de décor à l'approche de Chamery. J'ai repris des petites routes qui sont bien balisées et je suis arrivé à Hôpitot et un peu plus bas au village d'Arbourse.



Une dame sympathique sur mon chemin :

            Dans Arbourse, à une intersection, je ne voyais plus aucune balise ; et mon livre guide propose à cet endroit « de passer à la droite de l'église d'Arbourse », ce qui n'était pas clair à mes yeux compte tenu du fait que cet édifice est à 100 m dans une rue partant de cette intersection – et en y allant, je n'ai retrouvé aucune signalisation. Dans les livres, ce sont le plus souvent des phrases ramassées, parce que les éditeurs doivent y mettre beaucoup de choses, sur le chemin lui-même, sur l'histoire qui entoure les villes et villages traversés, sur les hébergements, et agrémenter le tout de photos. Il était difficile de coller à la phrase « passer à la droite de l'église », tout en effet dépend de la position du marcheur.

            J'ai vu un homme qui s'affairait autour de sa voiture dans son jardin, je l'ai interpellé pour lui demander des précisions sur le chemin. Il avait commencé à me répondre, quand sa femme, sur le pas-de-porte de sa maison, s'est interposée et m'a lancé : Je viens vous voir ! Et elle est venue dans la rue pour me parler. Pour ce qui est du chemin, me dit-elle, il vous suffit de descendre par où vous êtes arrivé – la balise que vous n’avez pas trouvée est plus bas, cachée par une boîte aux lettres, m’a-t-elle dit. Mais elle a fait bien plus : vous allez passer dans la montée qui est un peu plus loin dans une forêt ; à la sortie de cette forêt, tout à fait en haut, faites attention : à l'intersection ne prenez pas le chemin forestier qui part tout de suite sur votre gauche, beaucoup de pèlerins se sont perdus à cet endroit. Nous avons échangé un peu plus largement, et je suis parti, car des kilomètres m'attendaient pour rejoindre la Charité-sur-Loire.



Une deuxième forêt... et un vigneron m'a aussi conseillé :

            Après Arbourse, par la C201, un peu plus loin, j'ai quitté la route pour m'engager à travers les champs – le chemin herbeux venait d'être fauché et pendant un bon moment, j'ai marché sur des herbes fraîchement coupées ; puis la route monte, longe une forêt et y pénètre un peu plus haut. J'étais dans la forêt communale d'Arbourse : c'est dense, et le balisage est là. Il y a eu ensuite toute une partie où j’ai eu quelque peine à enjamber de grands arbres fraîchement abattus, et qui ont été laissés sur place tels quels, mais je me suis rendu compte que ces quelques obstacles ne pouvaient en aucune façon m’éloigner du sentier. Mais j'ai fini par arriver à la lisière de cette forêt, que j'ai longée un moment le long d'une vallée. Et ce fut une découverte quand je suis arrivé à l'intersection que la dame d'Arbourse avait pointée : il y avait un tourne à droite, jaune et bleu (des balises de Compostelle de la voie de Vézelay) – je regrette vraiment de ne pas avoir eu le réflexe de prendre une photo, parce que je n'en ai vu qu'un de ce type sur tout le chemin jusqu'à Saint-Jean-Pied-de-Port. J'ai pris à droite, mais le problème, c'est qu'à moins de 50 m, étant revenu sur le goudron, j'avais devant moi une fourche sans aucune balise. Alors, à droite ou à gauche ? Une branche descend presque parallèlement à la fin de la forêt et l'autre plonge dans la vallée. J'ai opté pour cette dernière. C'est ainsi qu'après avoir descendu un bon 150 m d'une petite route très pentue à travers une vigne, j'ai vu une camionnette garée dans cette vigne, et un homme qui y travaillait. Je lui ai demandé si le chemin que j'avais emprunté est bien un chemin de Compostelle. Très décontracté, il m'a répondu : tout le temps je les vois passer en haut, sur la ligne de crête, mais si vous voulez continuer par là, vous vous retrouverez au même point plus loin, après avoir fait de la route en plus. J'ai remonté la petite côte et je suis passé par en haut. Et plus loin je me suis retrouvé à l'entrée de la forêt de Mauvrain où les balises sont bien visibles. Et c'est à une aire de repos et de restauration au commencement de ces bois que j'ai mangé le pain, le jambon et le fruit que je trimbalais depuis Champlemy.

J'étais donc à nouveau dans une forêt, le balisage blanc et rouge bien présent. Il fallait faire un tout droit sur plus d'un kilomètre pour arriver aux environs de Mauvrain. Après Murlin, tout juste à côté, la direction de La Charité-sur-Loire est bien indiquée. Les préconisations de mon livre collaient bien au terrain, mais j'ai dû après ces agglomérations revenir un peu sur mes pas de façon à bien prendre le chemin qui mène en quelque sorte à ma 3e forêt de la journée.



De longues lignes droites dans la 3e forêt :

            J'ai passé encore beaucoup de temps dans la forêt domaniale de Raveau, avec deux voire trois parties en ligne droite qui sont toujours fatigantes parce que l'impression qui domine est qu'elles n'en finissent plus. Dans la dernière partie, c'est un large chemin forestier, dans une belle descente toute droite, entrecoupé de barrages de gros rochers qui portent parfois des balises. Durant cette descente, je me disais : je finirai bien par trouver un village au bas de cette descente, tout en essayant de deviner des toits au loin à travers les arbres. En faisant un point satellite, je me suis rassuré : je me rapprochais bien de Raveau, le village avant la Charité-sur-Loire. Dans la dernière partie, j'ai aussi compris que des agglomérations urbaines étaient à portée quand j'ai vu, en plusieurs endroits, dans des voitures, des amoureux qui venaient apprécier dans le calme et le silence les charmes de la nature.

            Tout à fait au bas de cette descente, alors que la zone des bois est toujours bien présente, j'ai eu quelques petites hésitations à prendre la bonne départementale qui conduit à Raveau, mais le balisage type Compostelle avait refait son apparition. Et c'est sur un banc que j'ai pris un peu de temps pour m'alimenter de façon à finir dans de bonnes conditions cette longue étape – mon pouce blessé la veille ne me gênait pas, mais j'avais une petite sensibilité à un gros orteil.

            Au sortir de Raveau, la vision sur la Charité-sur-Loire est nette, la ville est en bas, il ne me restait plus qu'à emprunter une longue départementale menant directement à l'arrivée – j'ai écarté alors le petit chemin balisé d'à côté, parce que vraisemblablement il m'aurait demandé encore plus de temps. Et je pense que j'ai été gagnant, j'ai passé facilement les nœuds routiers à l'entrée de la ville. Mais ce choix avait un inconvénient important : les véhicules circulent à grande vitesse sur cette route toute droite, heureusement que l'espace sur les bas-côtés est suffisant, à condition de marcher à gauche de la route pour voir ceux qui arrivent en face et de se mettre carrément sur le côté quand deux véhicules s'apprêtent à se croiser au niveau du marcheur.



Une chouette secrétaire ! Encore une personne sur mon chemin pour m'aider !

            Pour utiliser correctement le plan d'une ville, le mieux est de l'étudier un peu avant que le besoin ne survienne. J'avais repéré la rue du petit hôtel où j'avais réservé à la Charité-sur-Loire. Mais le repérage est encore plus facile quand une information sur le terrain permet de mieux se positionner au départ de la recherche sur le plan, surtout quand l'utilisation du GPS revient cher (le roaming), que la batterie de son téléphone est presque vide et qu'il importe donc de se garder une petite réserve d'énergie en cas de grande urgence.

            Le chemin rentre dans la ville par le bon bout, si je puis dire. Tout en continuant ma route, j'étais à la recherche d'un « pays » pouvant me donner des informations solides. La route descendante surplombait quelque peu le grand bâtiment d'une entreprise (garage, exposition et vente de voitures). Je me suis dirigé vers le garage, espérant trouver un client ou un employé. En y arrivant, j'ai vu dans un bureau vitré une dame, une secrétaire sans doute, qui regardait dans ma direction. Tout en m'approchant, je lui ai fait un signe de la main pour lui faire comprendre que je voulais entrer pour lui parler. Elle accepta d'un signe de la tête, et une fois à l'intérieur je lui ai dit tout de go : je ne viens pas pour une raison tenant à vos activités professionnelles, ce qui lui a fait rire étant donné que j'étais devant elle sans avoir descendu mon sac-à-dos, mais j'ai besoin que vous m'aidiez à situer une rue de la ville. Très gentille, elle m'a donné toutes les informations pratiques concernant la rue recherchée. Et en 5 minutes, j'étais sur place, à mon hôtel. Je pense avoir gagné un peu de temps, étant donné que la journée tirait sur la fin, que j'avais pas mal de petites choses à faire, et surtout à passer à la pharmacie prendre de la Betadine afin de soigner mon pouce – je n'avais emmené dans mon sac qu'une dosette –, et aller à l'église, qui est en bas de la ville, pour prendre des photos.



Un bon petit passage dans cet hôtel :

            Se soigner, se reposer, bien manger et dormir. Après deux dures journées, il fallait bien récupérer, même si Couy, la prochaine étape, n'est qu'à 20 km de la Charité-sur-Loire.

Une fois mes courses faites, je n'avais plus à sortir, l'hôtel dispose d'un petit restaurant très bien fréquenté. J'y ai bien mangé, à un prix raisonnable. Il en a été de même le lendemain pour le petit-déjeuner – j'ai pu me faire préparer un gros sandwich avant de reprendre la route.

Publication: le 8 août 2 019
Étape 3 : La Charité-sur-Loire, 35 km : mardi 19 mai 2 015



Photo : L'église de la Charité-sur-Loire (département de la Nièvre, en région de Bourgogne – voir la carte).







Résumé :

            Dans cette troisième étape, je n'ai pas vu, ni de près ni de loin, un seul pèlerin, un seul randonneur. Il est vrai qu'à mon départ de Vézelay, une grande majorité du groupe avait pris la variante de Nevers – cette dernière, fût-elle la plus belle, est plus exigeante physiquement. Pour ceux qui, à une heure différente de la mienne, sont partis par celle de Bourges, leurs découpages étaient vraisemblablement différents du mien – d'ailleurs, dès la première étape, beaucoup vont plus loin que Tannay.

            Dans cette 3e étape, à quelque chose près, j'ai suivi l'itinéraire que propose le guide Lepère ; le balisage du GR colle assez souvent aux départementales, et il y a de petits tronçons où réapparaît une signalisation Compostelle. Mais il n'y a pas, le plus souvent, la possibilité de court-circuiter les forêts sur le parcours. À ce propos, les passages dans ces zones ont été plus sécurisants, j'ai pu faire en plusieurs fois des vérifications avec ma boussole, et aussi par Internet, pour vérifier que j'étais dans la bonne direction. J’avais bien retenu les enseignements de l’étape de la veille.

            Pour mieux suivre le plan et les préconisations du Lepère, j'ai déchiré les pages correspondant à cette étape pour les avoir à portée de la main, le livre restant dans mon sac, et je les ai mises dans ma poche ; ces indications sont convenables sur cette étape, avec toutefois des imprécisions en certains endroits.

            Je n'ai pas vu la Charité-sur-Loire sous un beau soleil. Qu'est-ce que j'aurais voulu me retrouver par beau temps sur ce pont au-dessus de la Loire (voir photo) ! Je comprends que c'était une des haltes les plus importantes sur la Via Lemovicensis à une certaine époque.

            À mon arrivée, tout à fait en haut de cette ville, et après mon installation dans un petit hôtel, il m'a fallu faire un tour en ville pour trouver une pharmacie et prendre quelques photos de l'église (voir photo). Cette ville mérite que les pèlerins consacrent un peu plus de leur temps à la visiter.

Le lendemain matin, même après 8H, le ciel était toujours d'un gris foncé, je n'ai donc pas eu de belles photos de ce lieu. Si dans l'avenir, j'ai l'occasion de passer en Bourgogne, je reviendrai à la Charité-sur-Loire.



Un bon départ de Champlemy :

            Il n'était pas loin de 8H quand j'ai quitté la chambre d'hôtes de Champlemy ; j'étais bien, un bon pansement à mon pouce. La première chose avant de prendre le chemin était de passer dans le magasin d'alimentation d'en face : j'ai pris du pain, du jambon et un fruit. J'ai pris ensuite le balisage sur la D127 qui traverse la place du village, j'ai tourné à droite puis à gauche, mais, un peu plus loin, alors j'étais encore dans le bourg, il n'y avait plus de balise. J'ai même fait un retour sur mes pas, car une erreur dès le départ peut se payer cher. Mais j'avais compris que le détour menait finalement à un rond-point sur cette départementale. En revanche, je suis resté sur cette même route quand le balisage me poussait à passer dans les champs, parce que, sur le guide, ce même balisage ramène plus loin sur cette voie, pour peu que les pèlerins engagés ne s'égarent pas.



Une première forêt :

            Ce fut donc ensuite 4 km dans une zone forestière, pour tourner à gauche au carrefour de Bourras en direction de l'ancienne Abbaye – le paysage dans cette partie est magnifique – puis passer sur la D117 et entrer dans une forêt après avoir franchi une barrière. Ensuite, c'est pratiquement tout droit par des allées forestières qui descendent et un balisage à peu près correct : le blanc et le rouge du GR, mais aussi des petites balises de Compostelle par-ci, par-là.

Quand j'étais en forêt, je ne pouvais pas m'empêcher de regarder au loin de façon à anticiper la fin de cette piste, le souvenir de l'étape d'hier était encore bien présent dans ma tête. C'est que la voie que j'empruntais rencontre régulièrement d'autres chemins forestiers. Mais je me rassurais en vérifiant avec ma boussole que j'étais dans la bonne direction, car le plan indique pratiquement un sud-ouest constant sur bien plus d’un kilomètre.

            Puis ce fut une zone de bois et de pâtures, de petits champs, avant un vrai changement de décor à l'approche de Chamery. J'ai repris des petites routes qui sont bien balisées et je suis arrivé à Hôpitot et un peu plus bas au village d'Arbourse.



Une dame sympathique sur mon chemin :

            Dans Arbourse, à une intersection, je ne voyais plus aucune balise ; et mon livre guide propose à cet endroit « de passer à la droite de l'église d'Arbourse », ce qui n'était pas clair à mes yeux compte tenu du fait que cet édifice est à 100 m dans une rue partant de cette intersection – et en y allant, je n'ai retrouvé aucune signalisation. Dans les livres, ce sont le plus souvent des phrases ramassées, parce que les éditeurs doivent y mettre beaucoup de choses, sur le chemin lui-même, sur l'histoire qui entoure les villes et villages traversés, sur les hébergements, et agrémenter le tout de photos. Il était difficile de coller à la phrase « passer à la droite de l'église », tout en effet dépend de la position du marcheur.

            J'ai vu un homme qui s'affairait autour de sa voiture dans son jardin, je l'ai interpellé pour lui demander des précisions sur le chemin. Il avait commencé à me répondre, quand sa femme, sur le pas-de-porte de sa maison, s'est interposée et m'a lancé : Je viens vous voir ! Et elle est venue dans la rue pour me parler. Pour ce qui est du chemin, me dit-elle, il vous suffit de descendre par où vous êtes arrivé – la balise que vous n’avez pas trouvée est plus bas, cachée par une boîte aux lettres, m’a-t-elle dit. Mais elle a fait bien plus : vous allez passer dans la montée qui est un peu plus loin dans une forêt ; à la sortie de cette forêt, tout à fait en haut, faites attention : à l'intersection ne prenez pas le chemin forestier qui part tout de suite sur votre gauche, beaucoup de pèlerins se sont perdus à cet endroit. Nous avons échangé un peu plus largement, et je suis parti, car des kilomètres m'attendaient pour rejoindre la Charité-sur-Loire.



Une deuxième forêt... et un vigneron m'a aussi conseillé :

            Après Arbourse, par la C201, un peu plus loin, j'ai quitté la route pour m'engager à travers les champs – le chemin herbeux venait d'être fauché et pendant un bon moment, j'ai marché sur des herbes fraîchement coupées ; puis la route monte, longe une forêt et y pénètre un peu plus haut. J'étais dans la forêt communale d'Arbourse : c'est dense, et le balisage est là. Il y a eu ensuite toute une partie où j’ai eu quelque peine à enjamber de grands arbres fraîchement abattus, et qui ont été laissés sur place tels quels, mais je me suis rendu compte que ces quelques obstacles ne pouvaient en aucune façon m’éloigner du sentier. Mais j'ai fini par arriver à la lisière de cette forêt, que j'ai longée un moment le long d'une vallée. Et ce fut une découverte quand je suis arrivé à l'intersection que la dame d'Arbourse avait pointée : il y avait un tourne à droite, jaune et bleu (des balises de Compostelle de la voie de Vézelay) – je regrette vraiment de ne pas avoir eu le réflexe de prendre une photo, parce que je n'en ai vu qu'un de ce type sur tout le chemin jusqu'à Saint-Jean-Pied-de-Port. J'ai pris à droite, mais le problème, c'est qu'à moins de 50 m, étant revenu sur le goudron, j'avais devant moi une fourche sans aucune balise. Alors, à droite ou à gauche ? Une branche descend presque parallèlement à la fin de la forêt et l'autre plonge dans la vallée. J'ai opté pour cette dernière. C'est ainsi qu'après avoir descendu un bon 150 m d'une petite route très pentue à travers une vigne, j'ai vu une camionnette garée dans cette vigne, et un homme qui y travaillait. Je lui ai demandé si le chemin que j'avais emprunté est bien un chemin de Compostelle. Très décontracté, il m'a répondu : tout le temps je les vois passer en haut, sur la ligne de crête, mais si vous voulez continuer par là, vous vous retrouverez au même point plus loin, après avoir fait de la route en plus. J'ai remonté la petite côte et je suis passé par en haut. Et plus loin je me suis retrouvé à l'entrée de la forêt de Mauvrain où les balises sont bien visibles. Et c'est à une aire de repos et de restauration au commencement de ces bois que j'ai mangé le pain, le jambon et le fruit que je trimbalais depuis Champlemy.

J'étais donc à nouveau dans une forêt, le balisage blanc et rouge bien présent. Il fallait faire un tout droit sur plus d'un kilomètre pour arriver aux environs de Mauvrain. Après Murlin, tout juste à côté, la direction de La Charité-sur-Loire est bien indiquée. Les préconisations de mon livre collaient bien au terrain, mais j'ai dû après ces agglomérations revenir un peu sur mes pas de façon à bien prendre le chemin qui mène en quelque sorte à ma 3e forêt de la journée.



De longues lignes droites dans la 3e forêt :

            J'ai passé encore beaucoup de temps dans la forêt domaniale de Raveau, avec deux voire trois parties en ligne droite qui sont toujours fatigantes parce que l'impression qui domine est qu'elles n'en finissent plus. Dans la dernière partie, c'est un large chemin forestier, dans une belle descente toute droite, entrecoupé de barrages de gros rochers qui portent parfois des balises. Durant cette descente, je me disais : je finirai bien par trouver un village au bas de cette descente, tout en essayant de deviner des toits au loin à travers les arbres. En faisant un point satellite, je me suis rassuré : je me rapprochais bien de Raveau, le village avant la Charité-sur-Loire. Dans la dernière partie, j'ai aussi compris que des agglomérations urbaines étaient à portée quand j'ai vu, en plusieurs endroits, dans des voitures, des amoureux qui venaient apprécier dans le calme et le silence les charmes de la nature.

            Tout à fait au bas de cette descente, alors que la zone des bois est toujours bien présente, j'ai eu quelques petites hésitations à prendre la bonne départementale qui conduit à Raveau, mais le balisage type Compostelle avait refait son apparition (voir photo à l'entrée de Raveau). Et c'est sur un banc que j'ai pris un peu de temps pour m'alimenter de façon à finir dans de bonnes conditions cette longue étape – mon pouce blessé la veille ne me gênait pas, mais j'avais une petite sensibilité à un gros orteil.

            Au sortir de Raveau, la vision sur la Charité-sur-Loire est nette, la ville est en bas, il ne me restait plus qu'à emprunter une longue départementale menant directement à l'arrivée – j'ai écarté alors le petit chemin balisé d'à côté, parce que vraisemblablement il m'aurait demandé encore plus de temps. Et je pense que j'ai été gagnant, j'ai passé facilement les nœuds routiers à l'entrée de la ville. Mais ce choix avait un inconvénient important : les véhicules circulent à grande vitesse sur cette route toute droite, heureusement que l'espace sur les bas-côtés est suffisant, à condition de marcher à gauche de la route pour voir ceux qui arrivent en face et de se mettre carrément sur le côté quand deux véhicules s'apprêtent à se croiser au niveau du marcheur.



Une chouette secrétaire ! Encore une personne sur mon chemin pour m'aider !

            Pour utiliser correctement le plan d'une ville, le mieux est de l'étudier un peu avant que le besoin ne survienne. J'avais repéré la rue du petit hôtel où j'avais réservé à la Charité-sur-Loire. Mais le repérage est encore plus facile quand une information sur le terrain permet de mieux se positionner au départ de la recherche sur le plan, surtout quand l'utilisation du GPS revient cher (le roaming), que la batterie de son téléphone est presque vide et qu'il importe donc de se garder une petite réserve d'énergie en cas de grande urgence.

            Le chemin rentre dans la ville par le bon bout, si je puis dire. Tout en continuant ma route, j'étais à la recherche d'un « pays » pouvant me donner des informations solides. La route descendante surplombait quelque peu le grand bâtiment d'une entreprise (garage, exposition et vente de voitures). Je me suis dirigé vers le garage, espérant trouver un client ou un employé. En y arrivant, j'ai vu dans un bureau vitré une dame, une secrétaire sans doute, qui regardait dans ma direction. Tout en m'approchant, je lui ai fait un signe de la main pour lui faire comprendre que je voulais entrer pour lui parler. Elle accepta d'un signe de la tête, et une fois à l'intérieur je lui ai dit tout de go : je ne viens pas pour une raison tenant à vos activités professionnelles, ce qui lui a fait rire étant donné que j'étais devant elle sans avoir descendu mon sac-à-dos, mais j'ai besoin que vous m'aidiez à situer une rue de la ville. Très gentille, elle m'a donné toutes les informations pratiques concernant la rue recherchée. Et en 5 minutes, j'étais sur place, à mon hôtel. Je pense avoir gagné un peu de temps, étant donné que la journée tirait sur la fin, que j'avais pas mal de petites choses à faire, et surtout à passer à la pharmacie prendre de la Betadine afin de soigner mon pouce – je n'avais emmené dans mon sac qu'une dosette –, et aller à l'église, qui est en bas de la ville, pour prendre des photos.



Un bon petit passage dans cet hôtel :

            Se soigner, se reposer, bien manger et dormir. Après deux dures journées, il fallait bien récupérer, même si Couy, la prochaine étape, n'est qu'à 20 km de la Charité-sur-Loire.

Une fois mes courses faites, je n'avais plus à sortir, l'hôtel dispose d'un petit restaurant très bien fréquenté. J'y ai bien mangé, à un prix raisonnable. Il en a été de même le lendemain pour le petit-déjeuner – j'ai pu me faire préparer un gros sandwich avant de reprendre la route.