lundi 29 août 2022

 

Étape 5 : jeudi 3 mai 2 018 : Los Arcos :

Par rapport à la sortie du chemin à Estella, la ville s’est quelque peu étendue, étoffée, mais le balisage est correct. Et un peu plus haut, alors que les constructions se font moins importantes, deux itinéraires sont proposés : j’ai choisi celui du haut. Après une partie parcourue en 2 011 et en 2 014, dans une zone bien boisée, je me suis engagé dans un chemin vraiment nouveau qui s’écarte des zones connues pour moi, et je me suis retrouvé dans une partie plus montagneuse, qui domine en quelque sorte le chemin habituel, que je pouvais apercevoir au loin, parce que j’étais alors en montagne, en position dominante. Ce qui m’a rassuré, c’est que je sentais que le nouveau chemin que j’avais emprunté semblait bien se placer en parallèle au chemin habituel en bas dans la vallée. Et dans toute cette partie je n’ai pas rencontré âme qui vive. Cela ne m’a pas vraiment inquiété, mais en marchant j’attendais le moment où j’allais rejoindre le tracé que j’avais déjà emprunté. Et c’est en descendant en quelque sorte dans la plaine que j’ai vraiment retrouvé mes repères de 2 011 et 2 014. Et vu d’autres marcheurs en pleine action. Tout redevenait normal ! Photo: le gîte à Los Arcos.


Un espace-temps, dans la longue descente avant Los Arcos : Deuxième jour où je vois les coquelicots sur le chemin, pas en grand nombre, ni de belle qualité, mais ce n’était qu’un début. Les pauvres, ils auraient dû attendre un peu, car aujourd’hui un vent extrêmement froid se faisait constant – il n’y en avait pas des masses d’ailleurs !

 Il faisait tellement froid sous un vent assez fort dans une descente que je me suis mis dans les pas du jeune anglais qui était parti avant moi. J’avais les yeux tout humides, et je ne regardais pas le chemin. D’ailleurs, à moment donné, en jetant un œil au bas de cette faible descente, et ayant reconnu le paysage, je lui ai dit que nous avons commencé à dévier sur un autre chemin de randonnée, et me repérant par rapport à une petite colline boisée où je m’étais reposé en 2 014, j’ai pu corriger notre trajectoire, et rétablir la situation. Je suis resté dans son sillage jusqu’à Los Arcos, le froid sous le vent ne baissait pas, d’ailleurs le petit soleil qui sortait de temps à autre était bien pâle.

À noter que dans le dernier tiers du parcours, dans ces grandes parties en ligne droites à travers des champs en préparation pour des cultures, je suis tombé sur un petit bar où j’ai pu prendre un café chaud et un jus d’orange – les meilleurs du monde, à considérer les circonstances dans lesquelles je me trouvais.

Pour ne pas me compliquer la vie, j’ai pris le gîte habituel, pratiquement à l’entrée de la ville, et l’anglais lui a continué, je ne l’ai plus revu. Et le jeune Anglais, sans dire un mot, m’a fait comprendre qu’il continuait le chemin. Photo: on mange bien à Los Arcos.


Et ce fut le rituel habituel après la douche : aller au centre pour manger un peu, c’était encore une épreuve avec le vent froid qui continuait de souffler.

Toute la nuit une question n’a pas cessé de me tarauder l’esprit : l’évolution de l’état de santé de mon frère. Le lendemain matin, j’ai pris la décision d’arrêter ma marche et de me rendre à Marseille. Le responsable du gîte m’a aidé à trouver un enchaînement de bus pour sortir d’Espagne : un pour Logrono, et un deuxième pour Irun. Et il ne restait plus qu’à prendre le petit métro qui va à Hendaye – et, le lendemain, un Hendaye – Marseille en train en passant par Bordeaux – les réservations ont été faites sur mon portable. Photo: Je suis avec Janick sur le "Vieux Port, à Marseille, un an avant sa mort.


Et c’est à Hendaye alors que je traversais la gare que la nouvelle est tombée sur mon portable, de la part de mon frère Benjamin qui vit en Bretagne : Janick venait de nous quitter. J’avais bien anticipé – Inutile de dire que dans ce long trajet en train, le lendemain, une question tournait en boucle dans ma tête, sans que je puisse pour autant apporter une réponse sûre : est-ce que je reprends le chemin de Compostelle après les funérailles ? – je ne savais pas encore que le temps à passer à Marseille allait être bien long – attendre que les membres de la famille vivants (ou en séjour) dans l’Hexagone y rappliquent, pour découvrir aussi un peu plus tard que compte tenu de 2 jours fériés dans la semaine, le service d’incinération était embouteillé. En réalité, j’ai dû rester plus d’une semaine à Marseille, une ville où j’ai quelques racines : j’y ai vécu un peu plus de 4 années en cité universitaire.

Photo: se réchauffer à Los Arcos.
Où que tu sois, et quelles que soient les circonstances, ne pas perdre de vue l’essentiel et atteindre les objectifs prioritaires. La veille de mon départ de Marseille, ma décision est prise : après avoir participé à un grand repas entre familles et amis, j’ai senti que je me devais de repartir sur le camino Francès – j’ai changé de tenue entre deux voitures non loin du restaurant. Je ne savais pas encore que la soudure avec la partie réalisée avant serait bien difficile – en fait, en partant d’Irun (près d'Hendaye), le système le plus simple et le plus rapide, pour une question de transport en bus, me conduisait non pas à Los Arcos, mais à Burgos – le plus important alors était donc de continuer sur la partie Burgos – Santiago, soit une bonne vingtaine d’étapes. Ce qui m’a aussi réconforté dans ce choix, c’est que dans ce long trajet en bus, assis à l’avant du véhicule, en plusieurs fois j’ai vu des pèlerins qui avançaient sur des sentiers dans le paysage. J’avais bien repris le contact avec mon chemin de Compostelle.

mercredi 24 août 2022

 

Étape 4 : Estella : 22 km

Il n’était plus question de vivre un découpage autre que ce que j’ai pratiqué dans les 2 premiers Camino Francès, mon frère étant en fin de vie à Marseille, la nouvelle pouvait tomber à tout moment. Je « risquais » de ne pas avoir le temps de continuer mon chemin d’une seule traite, et donc être obligé de le reprendre après une suspension de quelques jours, parce qu’au bout, après la marche, il y avait de petits projets auxquels je tenais, ce qui m’aurait obligé à retarder mon retour à la Réunion, et à régler un supplément pour le billet d’avion.

Cette étape commence après un court passage sur une voie bien fréquentée par une petite route à travers des bois et passe ensuite par un chemin gravillonné qui monte sec, toujours dans un cadre bien boisé, et pendant un bon bout de temps avant d’atteindre au sommet une route à grande circulation.

La première partie de la journée est donc un véritable test de forme. Pour moi la tactique est simple : je me fais peut-être doubler dans le premier tiers, mais prudemment je reste dans mon rythme et je maintiens ma cadence dans le 2e tiers, pour finir au mieux dans le dernier tiers qui est un véritable mur.


J’ai dû vraiment me concentrer cette fois, après 2 011 et 2 014, pour continuer à ne pas m’arrêter dans cette partie. Mais il y a eu un moment où j’étais sur le point de craquer. J’ai tenu, en me disant que si je m’arrête, je risque aussi de glisser dans la pente, entrainé par le poids de mon sac. Voir la photo de Babou, un pèlerin rencontré sur le camino en2 011, qui attaque la difficile dernière partie – à l’époque, je marchais avec un simple bâton en bois.

Arrivé sur la route en haut, je ne me suis pas arrêté, content d’avoir bien résisté dans l’effort, et de ce que j’étais cette fois-ci seul face à moi-même.


La suite du paysage est vraiment agréable, reposant – surtout quand on découvre un village bien structuré, Cirauqui, ramassé sur lui-même dans cette campagne – et cette fois-ci je me suis arrêté pour boire un jus de fruits dans un bar (voir la photo de Cirauqui). 

L’espace change, et, bien entendu, le temps aussi pour le parcourir, puisque je marche à une vitesse moyenne de 4Km/h environ.

Dans la dernière partie du parcours, je m’attendais à entrer dans un bois pour déboucher ensuite à la porte de la ville. Mais le chemin a été quelque peu modifié – j’avançais cette fois-ci en rase campagne, par une petite route qui faisait des méandres à travers champs ; et sur le bord de la route, j’ai vu mes premiers coquelicots de la saison. Comme par enchantement, beaucoup de pèlerins s’attardaient ici ou là pas du tout pressés de rallier Estella. Et le plus surprenant pour l’époque, tout le monde ou presque était accroché à un portable, une façon de se concentrer sur son propre espace, et de trouver d’autres points d’appui avec des correspondants. En effet, par le portable, chaque individu se relie à un correspondant à un point donné et vraisemblablement connu de lui, il peut donc avoir une idée de la distance entre les deux points et bien caler une idée du temps pour parcourir cette distance.

Et à chacun de régler son avancement sur le chemin selon ses activités à l’arrivée et le temps qu’il entend y consacrer.


J’étais dans la première vague, les 10 à 15 premiers à se présenter au gîte municipal qui en fin de journée affichait complet. Et, pourtant les marcheurs arrivaient encore… et étaient orientés ailleurs.

Manger, visiter, comparer, échanger avec d’autres sans compter reconnaitre le terrain pour partir facilement le lendemain matin sont autant de préoccupations essentielles à la fin de chaque étape – et qu’est-ce que j’ai bien fait, car, le lendemain, j’ai pu constater par exemple de petits changements pour sortir d’Estella. Et c’est normal, les villes s’agrandissent, l’espace change, et bien entendu le temps pour parcourir cet espace est modifié !


Placé au 2e dortoir de l’albergue municipal (je demande toujours un lit en bas, voir photo) j’ai vu arriver le jeune Anglais du gîte de Cizur Menor – juste un petit bonjour. J’avais un certain empressement à découvrir cette ville, d’autant que j’avais deux priorités : manger quelque chose de chaud, et trouver une pharmacie pour remplacer mon tube de gel d’arnica, une protection indispensable pour mes pieds.

Le soir, j’ai dû attendre 19 h pour me faire servir dans un bar restaurant de l’autre côté du petit pont par rapport à mon gîte.


Il n’était plus question de faire un découpage autre que lors des 2 premiers Chemins, mon frère étant en fin de vie à Marseille, la nouvelle de son départ de notre monde pouvait tomber à tout moment, je risquais de ne pas avoir le temps de pratiquer un nouvel enchainement d’étapes, et donc d’être obligé de le reprendre après une suspension de quelques jours, parce qu’au bout, après la marche il y avait de petits projets auxquels je  tenais, ce qui m’aurait obligé de retarder mon retour à la Réunion, le déplacement de cette date entraine un supplément de la part d’Air France.

Le soir, j’ai dû attendre 19 h pour me faire servir dans un bar restaurant non loin du gîte – celui de 2 014, tout près du gîte, a « disparu ».

vendredi 19 août 2022

 

Étape 3 : Mardi 1e mai 18 : Puente la Reina :

C’est une étape au profil bien varié et original sur tous les plans : géographie physique, équipements, ressenti de la fréquentation. Et comme j’en suis à un 3e passage, je peux pousser ma réflexion un peu plus loin, éclairer mieux encore la perception des différentes parties : l’ascension sur presque 6 km de l’Alto del Perdon, comme pour la longue et plus que variée descente pour atteindre Puente la Reina. Au total un sensiblement 19 km où tout est toujours à une redécouvrir.

Encore un départ sans rien sur l’estomac ! Je n’ai pas voulu aller dans un petit bâtiment du gite où il avait, en produits et en matériels de quoi faire ce qu’il fallait pour un petit déjeuner acceptable, à condition de mettre quelques pièces dans des machines et de lancer un micro-onde, car, dans mon esprit, le bar un peu plus bas dans l’agglomération devait être ouvert, et qu’ainsi je pouvais gagner du temps. J’ai simplement oublié que c’était un jour férié. Ce fut donc encore une fois un départ avant 7 H avec seulement un peu d’eau dans l’estomac ; je m’élançais tout en sachant très bien que la route allait rapidement s’élever et que j’avais 5 km de côtes à faire avant d’arriver au village de Zariquiegui où je pourrais trouver de quoi me sustenter. C’était donc bien un « rebelote » de l’étape de la veille.


Après un bon km de plat relatif, la pente est bien là, et ce d’autant que le tracé a été modifié par rapport à la dernière fois – le chemin monte directement vers de Zariquiegui, avec de bons pourcentages de pente.
Et c’est avec bonheur que je me suis arrêté au bar de ce petit village où j’ai eu la même surprise de la veille : il y avait plein de pèlerins dans la petite salle, j’ai dû attendre mon tour pour me faire servir – il m’a semblé que l’établissement faisait aussi albergue. Les deux dames qui étaient au service me parurent bien efficaces dans leur travail, et rapidement j’ai eu mon thé et de quoi contenter mon estomac – mais manœuvrant entre des clients au bar – toutes les places assises étaient déjà occupées – j’ai fini par renverser ma tasse de thé. Et là j’ai vraiment apprécié le comportement de la serveuse : elle a refait rapidement mon thé et, surtout, a refusé que je paye cette nouvelle tasse. Et c’est debout sur un coin du bar que j’ai apprécié ce petit déjeuner. Pour laisser la place à d’autres pèlerins, j’ai repris mon chemin au plus vite.

Et c’est bien calé du côté de l’estomac que j’ai attaqué ensuite les presque 3 km qui attendent encore les marcheurs pour atteindre le sommet de l’Alto del Perdon. J’ai redécouvert des passages bien pentus pour atteindre ce sommet où les pèlerins ne se lassent pas d’admirer les alentours jusqu’à presque l’infini. Et sur place les sculptures et autres décoratifs. Et surtout balayer du regard tous les environs de Pampelune qui se trouvent aux pieds des ceux qui ont fait l’effort de faire cette étape – une véritable récompense, car il faut dépenser de l’énergie pour porter le sac à dos jusqu’en haut de cette position.

Comme d’habitude, le vent et le froid empêchent les pèlerins de rester longtemps, le temps bien entendu de prendre quelques photos.

Le sentier dans la première partie de la descente est plus rocailleux que lors des deux autres passages que j’ai eu l’occasion de faire ; et, bien entendu, à mi parcours de cette descente une petite pluie a fait son apparition, ce qui m’a obligé à sortir mon poncho, réactivant le souvenir du gros orage en 2 011 alors que je marchais avec deux autres pèlerins. Et dans le village de Muruzúbal, un peu plus bas, ce fut le passage devant le bar (bien amélioré aujourd’hui, offrant même des logements aux pèlerins), où nous nous sommes réfugiés, en 2 011 pour attendre la fin des intempéries.


La 2e partie de la descente vers Puente la Reina est plus agréable, et à Obanos j’ai repris un thé et un croissant parce que je n’écartais pas alors l’idée d’aller un peu plus loin que Puente la Reina. Et avant d’arriver à cette ville, comme d’habitude dans Obanos, j’ai quelque peu hésité sur le balisage, ce qui est sans conséquence puisque la direction générale s’impose automatiquement au coup d’œil.


Finalement, après la traversée de Puente la Reina, et le pont de la Reine où il y a toujours une affluence de simples touristes et de pèlerins, je me suis arrêté à l’albergue immédiatement après ce pont, sur la colline qui domine la ville. Je retrouvais donc le gîte de 2 014 qui en fin de journée était plein à craquer. Les Nordiques étaient en force sur ce camino 2 018.

Étant dans les tout premiers arrivants, j’ai pu bien choisir mon box et mon lit (dans ce grand albergue où il y a un ensemble de box de 4 lits, et tout est ouvert sur des couloirs qui mènent aux autres parties toujours spacieuses (bars et restaurants, douches et toilettes, espaces pour le lavage des vêtements) et j’ai eu largement le temps de faire une bonne et vraie lessive dans une machine, et de bien faire sécher tout mon linge étant donné le beau temps, l’exposition de l’établissement sur une colline, et un beau soleil, ce qui n’était pas tout à fait le cas à Cizur Menor. Et au diner, à 19H, j’ai fait un excellent repas – la grande salle du restaurant du gîte était complètement pleine.  Une bonne ambiance à table, et sur toutes les tables, un peu comme si ces gens-là se connaissent depuis longtemps. Un très bon gîte, à conseiller.



lundi 15 août 2022

 

Étape 2 : Cizur Menor, 5 km après Pampelune


Une étape, sa préparation est revisitée la veille, de façon à pouvoir bien enchainer les décisions sans perdre de temps le lendemain. Entre autres : heure du départ, provisions pour la route, temps à consacrer pour tel ou tel point intéressant, et à des possibilités de rencontres sur le parcours.

Je suis parti de Larrasoaña vers les 7h sans rien sur l’estomac – je pensais que le bar de la place serait naturellement ouvert à cette heure, mais c’était une erreur – mauvaise gestion d’un départ, informations non recueillies sur place. Mais je savais qu’à un peu moins de 5 km, à Zuriain, je pouvais prendre un bon petit déjeuner. Mais, dans cette situation, il ne faut surtout pas oublier de boire de l’eau, à la gourde, question de ne pas lancer une déshydratation.

Bien entendu, je n’étais pas le seul dans cette situation, il y avait un petit embouteillage à ce point de restauration. Pas de plaisanterie sur le chemin : une grosse part de gâteau et un grand thé – et aussi un bon sandwich au jambon pour la route. Durant cette première partie, j’ai cheminé depuis le départ le long des berges d’un cours d’eau et le plus souvent dans des bois.

Ce fut ensuite une nationale sur une courte distance avant de rentrer dans les champs, la redescente dans le même paysage que la dernière fois. Une petite pluie a fait son apparition et m’a obligé à sortir mon poncho, avec comme d’habitude quelques difficultés à bien recouvrir mon sac – la cape reste la meilleure des protections pratiques, mais elle se déchire facilement.

Les marcheurs sont aussi attendus sur le chemin. Un peu plus bas, devant une vieille église, sur des étals, un homme offrait, en donativo pour une association d’entraide, du café ou de thé, des jus de fruits et quelques petits gâteaux aux pèlerins – j’ai participé à son action, tout en buvant un thé et en mangeant un petit pain, nous avons discuté un peu de tout. Dans cette première partie le marcheur chemine depuis le départ le long des berges d’un cours d’eau et le plus souvent dans des bois. À chacun de trouver la manière d’investir un peu pour les autres !

Un peu plus loin j’ai rencontré 2 014 un Allemand qui avait quitté son pays, traversé la France en diagonale et fait ensuite le Camino – je l’ai revu bien plus tard, à Santiago, en compagnie de sa femme qui l’avait rejoint.


Mais en fait, rien n’a changé sur le chemin dans l’approche de Pampelune, à quelques immeubles près, si ce n’est l’approche routière non loin des remparts de la ville. C’est aux pieds de ces remparts que j’ai cassé une croûte avant d’entrer dans cette ville. Et je me suis un peu amusé avec un chien qui accompagnait un couple et une enfant. Il faisait la navette entre sa « famille » et moi ; sur un muret, je lui refilais mine de rien quelques petits bouts de pain à chaque fois qu’il revenait vers moi. Son maitre a eu quelques difficultés pour le ramener à « sa famille ».

Le centre-ville n’a pas bougé ; la place de la mairie est toujours bruyante en raison de l’affluence des touristes. Pour traverser cette grande ville, j’ai suivi le balisage, sur le dallage des trottoirs avec quelques petits ratés


dans les jardins un peu plus loin. Mais c’est après avoir fait la descente à côté de l’Université, et au bas de cette descente, que j’ai compris que le tracé avait quand même un peu bougé pour rejoindre Cizur Menor, le but des aménageurs étant tout simplement d’éloigner, autant que faire se peut, les marcheurs de la grande voie de circulation.

Je suis arrivé au même gîte de 2 014 plus qu’assez tôt – il n’y avait qu’un pèlerin déjà sur place. La dame a accepté de nous enregistrer avant l’heure officielle d’ouverture, et j’avais alors toutes les possibilités pour choisir mon lit dans le même petit dortoir que la dernière fois. 


Ce fut dans l’après-midi le grand lavage et la course avec le soleil jusqu’à la dernière minute pour faire sécher au maximum les pièces lavées. Mais aussi une balade dans cette petite agglomération, y compris le repérage d’un point de restauration pour le dîner.

Dans le dortoir, deux autres pèlerins sont arrivés ensuite : un jeune Anglais et un Coréen, les deux étant plus que discrets. La nuit a été bonne.

 

samedi 13 août 2022

 

Étape de Larrasaoňa

Le camino francès en 2 018 : Larrasaoňa, une belle étape de 27 km, et pas mal de situations de vie intéressantes :


Au départ de Roncesvallès, au rez-de-chaussée de ces beaux édifices d’accueil des pèlerins, on peut se faire un petit quelque chose de chaud tout en mangeant un biscuit de ses provisions de marche.

En ce début de matin gris, la cadence est bonne, et sans doute parce que l’étape est longue (27 km), et même s’il n’y a pas de grandes et de dures montées, l’investissement physique est important. C’est qu’il y a une espèce de compétition naturelle dans la toute première partie avec des jeunes décidés à montrer leurs capacités physiques – et où même les jeunes filles n’hésitent pas à plus ou moins défier leurs copains dans les raidillons. Ce qui n’a pas empêché de nombreux petits groupes de s’arrêter dans des zones forestières pour se sustenter quelque peu après qu’ils ont cru important d’investir dans une certaine compétition et avant que les dépenses d’énergie sur de longues distances ne les aient obligés à « mouliner » quelque peu pour mieux gérer cette première journée d’efforts.

Après une 2e petite ascension, c’est la longue descente d’un peu plus de 10 km à travers de zones bien boisées où les groupes se sont peu à peu disloqués – chacun gardant son propre rythme, se concentrant sur sa personne, sans se préoccuper forcément des autres. Et c’est dans cette longue descente que je me suis retrouvé sur les talons d’un homme qui me semblait prendre son temps pour contourner le moindre petit obstacle du chemin forestier ; mais j’ai vite compris qu’en fait il souffrait de sa cheville droite. Je suis alors resté calmement dans son pas, le sentier étant vraiment étroit et souvent encombré de branches. À aucun moment il ne s’est retourné. Devant Zubiri, à 5,5 km de l’arrivée, il s’est retourné et dans un franglais m’a remercié de l’avoir accompagné… il comptait s’y arrêter pour se faire soigner, car il souffrait beaucoup de sa cheville. Il ne me restait alors qu’un bon 5 km pour terminer cette première étape. Je ne l’ai plus revu sur le camino, mais cela ne veut pas dire qu’il ait abandonné – nous n’étions plus dans le même temps.


Deux urgences à l’arrivée
 : aller au bâtiment où se trouve l’administration qui gère cette étape pour avoir un lit ; au grand bar-restaurant que j’ai déjà apprécié en 2 011 et 2 014 réserver une place pour le dîner. Ensuite faire le tour de cette petite agglomération.



Il se passe toujours quelque chose dans ce restaurant de Larrasaoňa, juste après avoir quitté le chemin, traversé le cours d’eau sur le pont qui permet d’entrer au village, et tout de suite après le premier carrefour ; il est plus que fréquenté, et il y a toujours un grand mélange de toutes les nationalités.




Au bout d’une longue table, je me suis retrouvé avec deux Japonaises et un Japonais – ils avaient un avantage sur moi : ils parlaient parfaitement l’anglais, tandis que moi je ne pouvais sortir que des mots sans vraiment faire de phrases. Et pourtant nous avons pu converser sur pas mal de sujets. Grâce à une application Anglais-Français sur leurs portables : Je parlais près du portable en français, lequel retraduisait en anglais – ça a bien marché, d’autant que si je rencontre des difficultés à parler cette langue, je me débrouille un peu dans le défrichage d’un texte. J’ai passé de très bons moments au bout de cette table où nous avons bien mangé et bu quelques bons verres.

À mon retour au gîte, le dortoir était pratiquement tout occupé, y compris le lit au-dessus du mien – ce n’est que le lendemain, à mon départ tôt le matin, que j’ai découvert qu’il était occupé par l’Asiatique bien maquillée qui dormait d’un sommeil profond.

lundi 8 août 2022

Espace et temps 1

Mon Camino francès, en 2 018 :

Photo1 : la belle table à Huntto – bel accueil après avoir fait 4,5 km en pré-étape dans la montée du col de Lepeoder, la veille de cette première du camino, de façon à attaquer au cœur de cette belle ascension le lendemain et à enchaîner avec une bonne descente à Roncesvalles.




Photo2 : un petit point d’accueil pour caler une petite faim avant d’attaquer la longue et dure partie de ce col.


 Photo3 : sur la place de l’abbaye de Roncesvalles après une belle descente à partir du sommet du col.

Message :

J’ai commencé à « éclairer » mon camino francès 2 018 sur mon blog, qui est accessible sur le site de l’ARCC. Mais en pointant plus les rencontres faites au cours des différentes étapes, et ce que j’en ai retiré. J’aimerais qu’un court message à la page d’accueil du site de l’ARCC en informe les visiteurs, et pour pousser aussi les membres de notre association à se mettre dans cette démarche… Il y a tellement de choses à dire, à faire partager sur les chemins de Compostelle.

Pourquoi je donne de l’importance au Camino Francès ? On passe beaucoup de temps à regarder les autres pèlerins – cette tendance à être toujours dans la comparaison personnelle pour se « corriger » au mieux – un mieux pour se restaurer, dormir et se soigner. Au-delà de la découverte physique de ce monde nouveau, il y a les rencontres sur le chemin, dans les albergues de cette longue et belle épreuve.

Le petit salon, à côté du dortoir, et c’est la même organisation à chaque étage du gite de l’abbaye de Roncesvallès, la première halte en Espagne, avec un bon wi-fi, est un espace où dans le calme chacun peut se concentrer sur ce qu’il doit faire, une fois bien installé, toilette faite… en attendant de faire un tour dans les environs pour prendre une bière au bar du coin et réserver une place pour le dîner.

 Et c’est là qu’un jeune m’a adressé la parole. Il était dans un petit groupe qui faisait une halte dans l’ascension du col de Lepeoder… et il m’a vu monter à ma main. C’était son premier chemin. Il s’est dit intéressé par l’utilisation de deux bâtons – c’était sa première étape sur un chemin de Compostelle). Il y voyait une certaine efficacité. Je lui ai dit que c’est de la marche nordique, dans un rythme synchronisé des bâtons avec le mouvement des jambes, ce qui fait que le marcheur a toujours deux points d’appui sur le sol. Et que s’il lui arrivait de chuter, il pourrait aller jusqu’à toucher le sol, mais dans un mouvement bien amorti. Sans compter que les bâtons supportent à peu près 10% du poids du sac – je ne suis pas un spécialiste de cette méthode, mais après avoir fait mon premier chemin avec un bâton en bois en 2 011, je me suis mis à cette pratique dans tous autres les chemins que j’ai faits ensuite, année après année.

Nous avons discuté un peu de tout, de Compostelle, bien entendu ; et d’apprendre que les siens ont été un peu surpris de sa volonté à y aller au plus vite. Je lui ai surtout dit que ça me faisait vraiment plaisir de voir des jeunes sur le chemin, que ce qu’il engrangeait lui sera plus que profitable dans la vie. Et surtout, qu’il y reviendra certainement, et en insistant sur l’idée que le mieux est de bien réussir ce premier chemin. Je ne l’ai plus revu sur tout le camino, mais à chacun sa gestion du temps et de l’espace.