Étape
8 : Neuvy-Pailloux, 28 km : dimanche 24 mai 2 015
Photo :
Le Christ pantocrator (représentation en gloire de Jésus, par opposition à une
représentation en souffrance dans la passion) à l'église Saint-Laurent de Neuvy-Pailloux.
Résumé
de l'étape : Une étape de découverte de la religion dans l’histoire
Pour résumer cette première
semaine : je suis parti du département de la Nièvre (58), pour passer dans
celui du Cher (18), et j'en suis au département de l'Indre (36) – . À Neuvy-Pailloux, une commune qui se situe dans la région naturelle
de la Champagne Berrichonne, et dans l'aire urbaine de Châteauroux. Deux
éléments ont marqué cette étape : la visite de l'église du village et une
première sur le plan de la gastronomie : la soupe aux orties.
voir la
carte
La
marche :
De Chârost à Neuvy-Pailloux, les
marcheurs passent du département du Cher dans celui de l'Indre ; au
carrefour après Chârost, j'ai pris la N151 pour aller directement à Issoudun,
je n'ai donc pas fait tout le détour dans la campagne par Saugy, un bon
raccourci.
Issoudun est une grande ville, en y
entrant j'ai longé un grand parc où se trouvent des essences que je ne pouvais
pas identifier. J'ai interrogé un homme qui revenait de sa promenade matinale
en lui posant des questions précises, mais il n'a pas pu me renseigner ;
en revanche, il m'a donné des indications concernant d'autres points importants
de la ville : par exemple, un square où se trouve le palais des congrès, toujours sur la N 151 qui traverse la ville (voir photo), non loin de la basilique, et une stèle à la mémoire de Pierre Mendès
France (voir photo), un homme d'État français qui a marqué son époque par
« une conception exigeante de la politique ».
À partir d'Issoudun, j'ai utilisé
une partie du balisage et des départementales pour aller à Neuvy-Pailloux. Son
nom signifie nouvelle paille, la région était autrefois marécageuse. Le paysage
par rapport à l'étape précédente a changé d'une façon générale, il n'y a plus
de bois, mais plutôt des champs ; la circulation sur les routes est d'un
bas niveau, pour ne pas dire presque nulle sur certaines petites routes – il
est vrai que c'était un dimanche matin.
Et c'est dans un grand silence que
je suis rentré dans Neuvy-Pailloux (voir photo). J'ai avancé dans une longue
rue qui traverse tout le village, toujours sans le moindre bruit, et qui m'a
mené à l'église. Arrivé à une intersection en plein centre, j'ai vu deux femmes
qui discutaient dans une pièce de leur maison, une fenêtre grande ouverte
donnant presque sur le trottoir, et qui me fixaient. Après un petit signe de la
main pour captiver leur attention, je leur ai demandé où se trouve la rue
Pasteur : vous y êtes, me répondit l'une d'elles pendant que l'autre
rigolait. J'étais non seulement à la bonne rue, mais mon hébergement chez
l'habitant était tout près, à deux pas de l'église.
La
chambre d'hôtes :
Pour aller au 16 de la rue Pasteur,
il faut passer sous un porche, la maison de Monique Richard donne sur la rue,
mais l'entrée se fait par une ruelle. Je l'ai repérée après un coup d'œil sur
un abri transparent contigu à la maison, d’où j'ai pu voir des chaussures de
marche et divers objets de randonnée. Mais il n'y avait personne de présent dans
cette demeure à cette heure ; j'ai dû attendre un moment avant l'arrivée
de la propriétaire.
Monique est une femme qui communique
vite et bien. Accueil efficace : pendant que j'enlevais mes chaussures,
elle m'a demandé si j'avais une lessive à faire – cela ne pouvait que bien
tomber, j'avais commencé à puiser dans ma petite réserve de vêtements propres.
Elle m'a emmené aussitôt à ma chambre, à l'étage, en me disant que je serai le
seul pèlerin chez elle ce soir, mais qu'elle en attendait quatre pour le
lendemain.
En haut de l'escalier, dans le petit
espace salon qui donne accès aux différentes chambres trône sur un mannequin
l'uniforme de Monique qui est une jeune retraitée de la police municipale.
Après la douche, et mon installation
dans ma chambre, je suis descendu au rez-de-chaussée dans le séjour d'où j'ai
pu voir que dans la partie cuisine, elle avait commencé à s'occuper du dîner
(voir photo). J'ai utilisé son wi-fi pour les messages habituels, tout en
jetant un œil à la télévision, et en dégustant une bonne bière. Puis je suis
allé faire un tour sur la place (voir photo), en sachant très bien qu'une
visite détaillée de l'église était programmée en fin de journée.
Une
visite commentée de l'église :
Cette visite a été excellemment
commentée par Monique, ma logeuse (voir photo) – la vidéo donne une idée de la
qualité de l'acoustique dans cet édifice (voir ou revoir la vidéo).
En ce
qui concerne les monuments du patrimoine, connus ou moins connus, mais
restaurés et entretenus, je sais qu'il y a visite et visite. Il n'y a pas de
comparaison sur le plan de l'enrichissement personnel entre une simple visite
d'un pas un peu pressé et une visite sous la conduite d'un guide, et, pour peu
qu'il y ait un petit nombre de visiteurs sur le moment, la possibilité de poser
des questions aiguise encore plus la curiosité. Il est vrai qu'un audiophone
compense bien l'absence de guide rien que pour camper le site dans le mouvement
historique. Il y en a surtout dans les grands monuments et sites nationaux.
Quel que soit le positionnement
religieux, il est difficile de rester insensible au défilement du temps à
partir de ce qui est sous les yeux : passer d'une église moderne,
entièrement refaite en 1 970 – et aussi
une donation de particulier –, après qu'elle a été
bombardée en 1 941, réparée en 1 943, avec un résultat sans commune mesure avec
ce qu'a été cette même église du XIXe siècle, en découvrant qu’à
travers tous ces chambardements, un Christ en bois datant du XVIe
siècle émerge, étonnamment conservé, ce qui en fait toute sa valeur et dans
toutes les dimensions (voir photo). Sans compter que des fouilles (voir photo,
et photo) ont permis de découvrir un enracinement de ce village qui remonte au
XIIe siècle. Sous l'œil et le pouvoir d'un Christ pantocrator
découvert sous une couche de peinture bleue, une représentation d'un Christ en
gloire (voir photo) par rapport au Christ souffrant sur la croix, et donc plus
proche de la condition humaine.
Et la
prise de conscience d'une vie qui s'est construite dans cette région, autrefois
marécageuse, en relation avec cette église vient encore accentuer la curiosité
du visiteur.
Mais le plus extraordinaire, c'est
en ce dimanche de la Pentecôte, le jour où les chrétiens célèbrent l'esprit de
Dieu, que je découvre et que je me plonge dans l'histoire de cette église grâce
à Monique, alors que rien de rien n'avait été prévu, programmé dans ce sens...
Le
dîner :
Après les nourritures de l'esprit et
de l'âme, le temps était venu de passer à la nourriture du corps, quoique les
deux soient plus ou moins en relation.
Dans les chambres d'hôtes, le dîner
est toujours de qualité, mais ici l'accent a été mis sur une particularité, une
originalité qui marque l'accueil dans cette maison. En prenant un apéritif,
elle me posa une question : avez-vous déjà mangé de la soupe aux
orties ? Je lui ai dit que je connaissais surtout le côté désagréable de
cette plante ; je n'ai pas osé lui raconter comment, jeune, je l'ai
découverte dans un camp d'étudiants en Angleterre où l'accueil improvisé et
fait par un petit groupe d'Italiens consistait à glisser une branche d'ortie au
fond du sac de couchage pour tester un nouvel arrivant. Et encore moins comment
j'ai failli bien plus tard en Espagne goûter une fois de plus à la sensation
forte de brûlure dans un petit bois sur le Camino Francés au moment où un
besoin pressant se faisait sentir. Je lui ai dit que je n'ai jamais eu
l'occasion d’en manger, mais que j'avais plus ou moins entendu parler de ses vertus
sur le plan de la santé. Le mauvais et le bon ne sont jamais très éloignés. Ma
réponse à sa question a été de dire que j'étais tout à fait disposé à goûter
cette soupe puisque l'occasion se présentait, le chemin étant une découverte
tous azimuts.
Ce n'est pas mauvais du tout,
associée à de la pomme de terre elle tient bien en bouche. Excellente pour la
forme, pour ses apports en oligoéléments (magnésium et fer), ses vertus
diurétiques et drainantes, elle ne peut que faire du bien au marcheur, qui a plutôt
tendance à manger les mêmes choses – plus loin sur le chemin, alors que j'avais
plus ou moins intégré un petit groupe, j'ai appris de Cor, un pèlerin
néerlandais qui travaille dans la restauration, l'importance à varier la
nourriture sur le chemin, une excellente habitude à prendre pour mieux résister
à un effort qui dure longtemps. Le chemin est aussi un apprentissage dans ce
domaine.
La table d'hôte a bien entendu des
avantages : un bon coucher, sans ronfleur – quoiqu’il puisse y avoir des
chambres à plusieurs lits et donc une possibilité de voisiner un
ronfleur ; un bon dîner et un bon petit déjeuner le matin avant de partir,
un bon wi-fi et la possibilité de lavage des vêtements à la machine (un service
que met en place de plus en plus d’autres types d’hébergement). Mais rien ne
vaut, et pas même le petit hôtel, un bon gîte municipal, en petit groupe, où la
bouffe, y compris les achats, se fait en commun, à condition d'avoir un
débrouillard en cuisine, d'autant que ce type d'hébergement est généralement
sur le balisage en ville, et à la proximité des commerces en tous genres.