mardi 3 septembre 2019


Étape 8 : Neuvy-Pailloux, 28 km : dimanche 24 mai 2 015



Photo : Le Christ pantocrator (représentation en gloire de Jésus, par opposition à une représentation en souffrance dans la passion) à l'église Saint-Laurent de Neuvy-Pailloux.






Résumé de l'étape : Une étape de découverte de la religion dans l’histoire

            Pour résumer cette première semaine : je suis parti du département de la Nièvre (58), pour passer dans celui du Cher (18), et j'en suis au département de l'Indre (36) – . À Neuvy-Pailloux, une commune qui se situe dans la région naturelle de la Champagne Berrichonne, et dans l'aire urbaine de Châteauroux. Deux éléments ont marqué cette étape : la visite de l'église du village et une première sur le plan de la gastronomie : la soupe aux orties.
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La marche :

            De Chârost à Neuvy-Pailloux, les marcheurs passent du département du Cher dans celui de l'Indre ; au carrefour après Chârost, j'ai pris la N151 pour aller directement à Issoudun, je n'ai donc pas fait tout le détour dans la campagne par Saugy, un bon raccourci.

            Issoudun est une grande ville, en y entrant j'ai longé un grand parc où se trouvent des essences que je ne pouvais pas identifier. J'ai interrogé un homme qui revenait de sa promenade matinale en lui posant des questions précises, mais il n'a pas pu me renseigner ; en revanche, il m'a donné des indications concernant d'autres points importants de la ville : par exemple, un square où se trouve le palais des congrès, toujours sur la N 151 qui traverse la ville (voir photo), non loin de la basilique, et une stèle à la mémoire de Pierre Mendès France (voir photo), un homme d'État français qui a marqué son époque par « une conception exigeante de la politique ».

            À partir d'Issoudun, j'ai utilisé une partie du balisage et des départementales pour aller à Neuvy-Pailloux. Son nom signifie nouvelle paille, la région était autrefois marécageuse. Le paysage par rapport à l'étape précédente a changé d'une façon générale, il n'y a plus de bois, mais plutôt des champs ; la circulation sur les routes est d'un bas niveau, pour ne pas dire presque nulle sur certaines petites routes – il est vrai que c'était un dimanche matin.

            Et c'est dans un grand silence que je suis rentré dans Neuvy-Pailloux (voir photo). J'ai avancé dans une longue rue qui traverse tout le village, toujours sans le moindre bruit, et qui m'a mené à l'église. Arrivé à une intersection en plein centre, j'ai vu deux femmes qui discutaient dans une pièce de leur maison, une fenêtre grande ouverte donnant presque sur le trottoir, et qui me fixaient. Après un petit signe de la main pour captiver leur attention, je leur ai demandé où se trouve la rue Pasteur : vous y êtes, me répondit l'une d'elles pendant que l'autre rigolait. J'étais non seulement à la bonne rue, mais mon hébergement chez l'habitant était tout près, à deux pas de l'église.



La chambre d'hôtes :

            Pour aller au 16 de la rue Pasteur, il faut passer sous un porche, la maison de Monique Richard donne sur la rue, mais l'entrée se fait par une ruelle. Je l'ai repérée après un coup d'œil sur un abri transparent contigu à la maison, d’où j'ai pu voir des chaussures de marche et divers objets de randonnée. Mais il n'y avait personne de présent dans cette demeure à cette heure ; j'ai dû attendre un moment avant l'arrivée de la propriétaire.

            Monique est une femme qui communique vite et bien. Accueil efficace : pendant que j'enlevais mes chaussures, elle m'a demandé si j'avais une lessive à faire – cela ne pouvait que bien tomber, j'avais commencé à puiser dans ma petite réserve de vêtements propres. Elle m'a emmené aussitôt à ma chambre, à l'étage, en me disant que je serai le seul pèlerin chez elle ce soir, mais qu'elle en attendait quatre pour le lendemain.

            En haut de l'escalier, dans le petit espace salon qui donne accès aux différentes chambres trône sur un mannequin l'uniforme de Monique qui est une jeune retraitée de la police municipale.

            Après la douche, et mon installation dans ma chambre, je suis descendu au rez-de-chaussée dans le séjour d'où j'ai pu voir que dans la partie cuisine, elle avait commencé à s'occuper du dîner (voir photo). J'ai utilisé son wi-fi pour les messages habituels, tout en jetant un œil à la télévision, et en dégustant une bonne bière. Puis je suis allé faire un tour sur la place (voir photo), en sachant très bien qu'une visite détaillée de l'église était programmée en fin de journée.



Une visite commentée de l'église :

            Cette visite a été excellemment commentée par Monique, ma logeuse (voir photo) – la vidéo donne une idée de la qualité de l'acoustique dans cet édifice (voir ou revoir la vidéo).

En ce qui concerne les monuments du patrimoine, connus ou moins connus, mais restaurés et entretenus, je sais qu'il y a visite et visite. Il n'y a pas de comparaison sur le plan de l'enrichissement personnel entre une simple visite d'un pas un peu pressé et une visite sous la conduite d'un guide, et, pour peu qu'il y ait un petit nombre de visiteurs sur le moment, la possibilité de poser des questions aiguise encore plus la curiosité. Il est vrai qu'un audiophone compense bien l'absence de guide rien que pour camper le site dans le mouvement historique. Il y en a surtout dans les grands monuments et sites nationaux.

            Quel que soit le positionnement religieux, il est difficile de rester insensible au défilement du temps à partir de ce qui est sous les yeux : passer d'une église moderne, entièrement refaite en 1 970 – et   aussi une donation de particulier –, après qu'elle a été bombardée en 1 941, réparée en 1 943, avec un résultat sans commune mesure avec ce qu'a été cette même église du XIXe siècle, en découvrant qu’à travers tous ces chambardements, un Christ en bois datant du XVIe siècle émerge, étonnamment conservé, ce qui en fait toute sa valeur et dans toutes les dimensions (voir photo). Sans compter que des fouilles (voir photo, et photo) ont permis de découvrir un enracinement de ce village qui remonte au XIIe siècle. Sous l'œil et le pouvoir d'un Christ pantocrator découvert sous une couche de peinture bleue, une représentation d'un Christ en gloire (voir photo) par rapport au Christ souffrant sur la croix, et donc plus proche de la condition humaine.

Et la prise de conscience d'une vie qui s'est construite dans cette région, autrefois marécageuse, en relation avec cette église vient encore accentuer la curiosité du visiteur.

            Mais le plus extraordinaire, c'est en ce dimanche de la Pentecôte, le jour où les chrétiens célèbrent l'esprit de Dieu, que je découvre et que je me plonge dans l'histoire de cette église grâce à Monique, alors que rien de rien n'avait été prévu, programmé dans ce sens...



Le dîner :

            Après les nourritures de l'esprit et de l'âme, le temps était venu de passer à la nourriture du corps, quoique les deux soient plus ou moins en relation.

            Dans les chambres d'hôtes, le dîner est toujours de qualité, mais ici l'accent a été mis sur une particularité, une originalité qui marque l'accueil dans cette maison. En prenant un apéritif, elle me posa une question : avez-vous déjà mangé de la soupe aux orties ? Je lui ai dit que je connaissais surtout le côté désagréable de cette plante ; je n'ai pas osé lui raconter comment, jeune, je l'ai découverte dans un camp d'étudiants en Angleterre où l'accueil improvisé et fait par un petit groupe d'Italiens consistait à glisser une branche d'ortie au fond du sac de couchage pour tester un nouvel arrivant. Et encore moins comment j'ai failli bien plus tard en Espagne goûter une fois de plus à la sensation forte de brûlure dans un petit bois sur le Camino Francés au moment où un besoin pressant se faisait sentir. Je lui ai dit que je n'ai jamais eu l'occasion d’en manger, mais que j'avais plus ou moins entendu parler de ses vertus sur le plan de la santé. Le mauvais et le bon ne sont jamais très éloignés. Ma réponse à sa question a été de dire que j'étais tout à fait disposé à goûter cette soupe puisque l'occasion se présentait, le chemin étant une découverte tous azimuts.

            Ce n'est pas mauvais du tout, associée à de la pomme de terre elle tient bien en bouche. Excellente pour la forme, pour ses apports en oligoéléments (magnésium et fer), ses vertus diurétiques et drainantes, elle ne peut que faire du bien au marcheur, qui a plutôt tendance à manger les mêmes choses – plus loin sur le chemin, alors que j'avais plus ou moins intégré un petit groupe, j'ai appris de Cor, un pèlerin néerlandais qui travaille dans la restauration, l'importance à varier la nourriture sur le chemin, une excellente habitude à prendre pour mieux résister à un effort qui dure longtemps. Le chemin est aussi un apprentissage dans ce domaine.

            La table d'hôte a bien entendu des avantages : un bon coucher, sans ronfleur – quoiqu’il puisse y avoir des chambres à plusieurs lits et donc une possibilité de voisiner un ronfleur ; un bon dîner et un bon petit déjeuner le matin avant de partir, un bon wi-fi et la possibilité de lavage des vêtements à la machine (un service que met en place de plus en plus d’autres types d’hébergement). Mais rien ne vaut, et pas même le petit hôtel, un bon gîte municipal, en petit groupe, où la bouffe, y compris les achats, se fait en commun, à condition d'avoir un débrouillard en cuisine, d'autant que ce type d'hébergement est généralement sur le balisage en ville, et à la proximité des commerces en tous genres.