vendredi 28 février 2020


Étape 29 : de Bazas à Captieux : 20,6 km


Photo : L'église de Captieux



Résumé de l'étape :


            Captieuse est une commune du Sud-Ouest de la France, dans la Gironde, à proximité des Landes et du Lot-et-Garonne. Son nom d'origine latine signifie selon le Lepère « tête de la forêt », en raison de son implantation dans cette région.


            Deux éléments importants dans le déroulé de cette étape : le chemin suit une ancienne ligne de chemin de fer, une belle ligne droite dans une région richement boisée ; une prise de contact avec la grande forêt de pins a été marquée par l'obligation de faire un repérage à la boussole pour retrouver le balisage dans la dernière partie de cette étape, et pouvoir rentrer à Captieux par la D 114.


Le déroulement de l'étape :

            De bon matin, à Bazas, nous avons préparé notre petit déjeuner, en piochant aussi dans les provisions à la disposition des pèlerins dans la cuisine du gîte (thé, café, biscuit, sucre). Alain comme d'habitude a préparé ses pâtes pour la route. – Il a eu la gentillesse de m'associer à ses préparations, pour mon grand plaisir, et ce d'autant qu'il les porte dans son sac. 

En sortant du gîte, la petite pluie de la nuit était encore présente, il a fallu sortir le poncho et une polaire, car il faisait frisquet.

            Deux nouveautés dans cette 29e étape : le chemin emprunte une ancienne ligne de chemin de fer où les rails ont été enlevés, mais où il subsiste encore par-ci par-là des restes presque enfouis de traverses en bois, des petits ponts au-dessus des cours d'eau et surtout des anciennes gares assez bien conservées qui regardent passer non plus les trains mais les marcheurs ; et, dans la 2e moitié, nous nous sommes quelque peu perdus dans les bois.

Une ancienne ligne de chemin de fer : Nous n'avons pas mis beaucoup de temps à sortir de l'agglomération de Bazas, et c'est un chemin herbeux qui nous a conduits à un tracé dans les bois, parfaitement rectiligne et bien balisé selon les normes européennes. Au début, c'est un plaisir que de marcher sur cette piste bien plate et de regarder le point infini par où, par effet de perspective, les deux bords parallèles semblent se rencontrer ; mais cela devient vite lassant, parce que finalement trop monotone. Une large courbe ou une ondulation du terrain aurait été bien accueillie. La fin de cette ligne droite fut même revivifiante.

            Un avantage certain cependant : il n'y a pas de galets, tout est bien plat et net, mais il y a toujours un inconvénient : quand les petits cailloux entrent dans les chaussures, il n'y a pas de grosses pierres pour poser son pied de façon à retirer facilement la chaussure sans avoir à descendre le sac à dos. Il faut donc se baisser jusqu'au sol et dans cette position, vider une chaussure tout en veillant à l'équilibre du sac à dos exerce une forte tension sur les tendons des chevilles. Comme je suis assez sensible de ce côté-là, une douleur est apparue, particulièrement à la cheville gauche, heureusement que le gros orteil du même pied me laissait tranquille ce jour-là. De plus, pour contourner un petit pont de l'ancienne ligne de chemin de fer, il a fallu d'abord passer dans un petit ruisseau et ensuite grimper un véritable mur de boue en vue de reprendre la ligne droite, ce qui a exacerbé cette douleur. J'ai dû me résoudre à prendre 2 arnicas en formule homéopathique, une prise que j'ai renouvelée un peu plus loin. Efficace ! Dans la dernière grande partie du parcours, mes talons ne faisaient plus partie de mes préoccupations, sans doute aussi parce que j'avais une autre priorité : retrouver le chemin, car nous étions perdus dans une forêt de pins.

Une boussole et un plan pour se rattraper : D'abord, il y a eu un raté dans un village à mi-parcours, et un peu plus loin nous avons repris le balisage en nous renseignant auprès des gens rencontrés. Nous avons traversé un petit cours d'eau dans une végétation luxuriante, les fougères remplissent les sous-bois, et ensuite nous sommes rentrés dans une grande et vraie forêt de pins. Tout se passait bien. Puis le balisage a disparu, et un peu plus loin nous avons eu l'impression de tourner en rond, car cette forêt est quadrillée par des petits chemins forestiers. Après avoir orienté au nord mon plan à l'aide de ma boussole, j'ai dit à Alain qu'il fallait privilégier la direction sud-sud-ouest, la direction générale pour rejoindre Captieux. Et nous avons abouti à une petite route départementale toujours en pleine forêt. À ce point, une véritable et pourtant simple question s'est posée : dans cette région plate en pleine forêt où le marcheur ne peut voir que de grands arbres et le ciel, fallait-il prendre à droite ou à gauche pour se rapprocher de l'arrivée ? La carte orientée avec la boussole indique bien que pour retrouver la N 524, et dans le sens qui conduit à Captieux, il faut prendre à droite. Pour moi, c'était imparable, et je n'ai pas cherché à faire une connexion Internet pour le vérifier ; Alain l'a fait sur son téléphone, et il a vérifié ma proposition en marchant tout en suivant le sens déplacement du point donnant notre position sur son écran, ce qui n'est possible qu'à la condition d'orienter aussi au nord le plan affiché sur l'appareil et de ne pas changer d'échelle en pinçant l'écran. Et au bout d'une bonne marche sur cette route forestière, nous nous sommes bien rapprochés de cette nationale, et nous avons pu retrouver le balisage. Sans n’avoir rencontré ni un agent forestier, ni un ouvrier sur un chantier en forêt, ni même un randonneur du dimanche. Ce fut un bon rappel : dimanche est un jour particulier, pour tout, et le pèlerin ne doit jamais l'oublier.



Un petit gîte municipal :

            En ce dimanche, en fin de matinée, la priorité était de faire des courses pour le repas du soir et la journée du lendemain. La petite supérette de l'autre côté de l'église était encore ouverte. Nous avons fait des achats en commun, mais chacun se réservant une part personnelle, y compris Cor qui était déjà sur place avec sa famille – le lendemain, il reprenait le chemin avec nous. C'était fini « les vacances familiales » pour lui !

            La deuxième priorité pour moi, selon mes habitudes, avant d'aller boire un coup au bar juste à côté, c'était d'aller prendre possession de mon lit au gîte.

            C'est une petite maison dans une petite rue derrière l'église, et en y arrivant, j'ai constaté que la porte d'entrée était ouverte, un pèlerin en effet occupait déjà les lieux – il avait même pris sa douche, je n'avais donc pas à attendre mon tour. Ce pèlerin était bien celui que j'avais vu remonter la place du marché à la cathédrale de Bazas ; je l'avais d'ailleurs entrevu à une intersection, il avait pris à droite alors que nous avons continué tout droit en suivant les balises. J'avais pensé qu'il s'était trompé, mais, en fait, il avait coupé au plus court, et ce n'est que dans les jours suivants que je me suis rendu compte de son expérience sur le chemin, de sa cadence de marche. Nous nous sommes juste salués, chacun vaquant à ses occupations. Une autre tâche importante du jour, c'était la lessive puisque dans la petite cour, il y avait des cordes à linge et que les rayons du soleil y entraient encore.

            Avant qu'Alain n'arrivât, des Hollandais avaient débarqué, mais ce n'était pas la petite bande que j'avais vue au gîte de Port-Sainte-Foy. Dans la pièce principale de ce local, la partie dortoir, où chacun range ses affaires et prépare son lit, il y a tout juste de l'espace pour circuler.

            Peu de temps après, alors que j'étais dans la petite cour à retourner mes vêtements sur le fil de façon à les faire sécher rapidement, Sébastien, le jeune que notre groupe a rencontré dans l'étape de Mussidan, et qui fait le chemin à sa façon, est passé en coup de vent. Après qu'il eut jeté un grand coup d'œil circulaire dans le dortoir, et avant qu'il ne m'ait laissé le temps de l'interpeller, il avait déjà quitté le gîte – il n'y avait plus de place à négocier, il devait donc utiliser au mieux son temps à chercher un toit pour la nuit.

            La responsable de l'hébergement est passée en fin d'après-midi pour enregistrer les arrivants et tamponner les credentials (voir photo) – c'est une Hollandaise, qui a fait le chemin de Compostelle, bien entendu, et qui parle parfaitement le français, sans aucun accent. C'est un plaisir de discuter avec elle ! Une femme cultivée, et qui se met naturellement à la disposition des autres.

            Alain et moi avions occupé la petite cuisine à la préparation d'un vrai repas ; le pèlerin de Bazas se contentant de réchauffer un petit quelque chose dans une casserole ; en vue du dîner, nous avons aussi pris position très tôt à la table sur la petite terrasse, et nous l'avons ensuite cédée aux Hollandais, qui eux n'ont pas du tout les compétences d'un Alain en cuisine. À chacun selon ses possibilités, l'essentiel est de réussir son chemin.

            Cor n'a pas mangé avec nous, le camping-car de sa famille était, d'ailleurs, stationné non loin du gîte.