lundi 2 mars 2020


Étape 30 : de Captieux à Roquefort-de-Marsan : 29 km.


Photo : L'église Notre Dame-de-l'Assomption à Roquefort-de-Marsan, vue du « Café de la Paix », sur l'autre rive de la Douze.

Résumé de l'étape :

            C'est une longue étape, sous un beau temps bien que le départ à Captieux fût quelque peu maussade.

            Elle se déploie dans les pins, voire des chênes ; le chemin est bien inséré dans un cadre de verdure où le travail d'exploitation de ce capital se voit bien – la région entretient et vit de ce patrimoine qu'est la forêt des Landes.

            Je suis donc passé dans le département des Landes où le balisage d'une association landaise est à peu près correct, irréprochable même sur l'ancienne ligne de chemin de fer, mais avec des imperfections voire des contradictions quant à l'utilisation des flèches accompagnant les balises européennes en fin de parcours. Il se confirme sur le terrain que le balisage européen doit être directionnel, et présenté comme tel.

            L'église Notre-Dame-de-l'Assomption, qui domine le cours d'eau La Douze, se regarde toujours comme une fortification du temps des guerres de religion ; le fait d'être agrémentée aujourd'hui d'un petit jardin bien entretenu adoucit le regard - il y aurait aussi un refuge, mais nous avons choisi celui de l'association landaise des amis de Saint-Jacques dont les clés sont habituellement déposées au « Café de la Paix ».

            Un passage inoubliable : j'y ai revu la responsable de Captieux, la Hollandaise, qui nous a accueillis de fort belle façon – elle m'a épelé son nom, mais je me demande si ce n'est pas son prénom. Nous n'étions pas nombreux, mais quelle ambiance au dîner !

Le déroulement de l'étape :

            Au départ de Captieux, nous avons pris la rue de l'église, et, à l'intersection de la N 524, la direction Maillas ; ce qui m'intriguait, c'est que je ne voyais aucune balise. Il a fallu attendre, après 700 m environ, la reprise de l'ancienne voie ferrée pour que tout rentre dans l'ordre, dans ma tête du moins ! Nous étions bien dans la continuation de l'étape de la veille.

            À partir de là, c'est le balisage de la société landaise des Amis de Saint-Jacques, coquille jaune sur fond bleu, qui s'impose, et c'est bien fait ! C'était reposant, du moins comme hier dans un premier temps.

            Après un carrefour et la reprise de la piste, je sentais que les petites pierres guettaient l'occasion d'entrer dans mes chaussures. Je crois qu'au prochain chemin, je tâcherai de limiter ces petits ennuis en portant des guêtres ou autre chose de plus simple mais remplissant la même fonction, et ce d'autant que je n'aime pas utiliser des chaussures hautes parce que plus lourdes ; jusqu’ici, je les considérais comme des accessoires inutiles, décoratifs, mais les pistes sablonneuses dans les pins m'ont fait changer d'avis.

            Le chemin longe de petites propriétés privées, franchit de petits cours d'eau, et se glisse même sous l'autoroute un peu plus loin. Nous avons retrouvé aussi des départementales, la D 224 nous a menés au village de Bourriot-Bergonce où nous avons fait une pause déjeuner.

            Mais c'était pour reprendre le tracé de l'ancienne ligne de chemin de fer. Nous sommes ensuite arrivés, en pleine forêt, à un carrefour important, bien signalé : à droite pour les pèlerins qui veulent aller à Retjons, qui est aussi un point d'étape ; et à gauche ceux qui veulent visiter la chapelle de Lugaut.

            Je me suis rapproché de cette chapelle ; elle est placée dans un beau cadre de verdure, et je me suis assis sur un banc pour attendre Cor qui, lui, tenait à visiter cette chapelle. Je la voyais vraiment quelconque, mais je peux dire que j'ai raté un site important : sur les murs de son clocher les visiteurs peuvent admirer un ensemble exceptionnel de fresques du XIIIe siècle représentant des scènes religieuses de l'Annonciation, de la Visitation et de la Résurrection. Ce qui explique pourquoi Alain et moi avions dû attendre un bon moment avant que notre ami Cor ne termine sa visite. La leçon à retenir : mieux se documenter dans le livre guide avant de se lancer dans l'étape du jour.

            Nous avons continué tout droit, sur le ballast de l'ancienne voie ferrée, l'arrivée était encore à 10 km.

Dans cette petite ville de Roquefort, après la principale intersection de rues, instinctivement nous avons continué à suivre le balisage en empruntant une montante à côté de l'église. Un homme est venu vers nous et s'est présenté comme un responsable de la municipalité. Il nous a indiqué la direction à prendre pour trouver le refuge de l'association des Amis Landais de Saint-Jacques.

            Comme d'habitude, Alain et Cor décidèrent de rester dans les environs, mais j'ai préféré aller m'installer dans l'hébergement retenu en commun. J'ai pris un peu plus loin une petite rue, ne le trouvant pas tout de suite, je suis entré dans une cour pensant y être arrivé. Mais le propriétaire des lieux, quelque peu surpris par cette intrusion, m'indiqua qu'il fallait poursuivre un peu plus loin dans cette même ruelle. Après avoir présenté mes excuses, j'ai continué à marcher dans la direction indiquée, et je suis arrivé à une porte encastrée dans un mur, et en l'ouvrant je suis tombé sur un escalier abrupt qui démarre auprès d'un petit banc – c'est là qu'il faut enlever ses chaussures de marche et mettre ses savates avant de monter un escalier parfaitement ciré menant au gîte. C'est à peu près la même adaptation que j'ai vue à Saint-Ferme : un local à l'étage d'un bâtiment (ici une école) a été transformé en hébergement pour les pèlerins, et il a bien fallu construire un accès extérieur à ce bâtiment d'origine, d'où cet escalier pentu.


Le gîte de la société landaise des Amis de Saint-Jacques :

            J'ai été accueilli par la même Hollandaise du gîte de la veille, à Captieux – elle assure donc la responsabilité des deux gîtes de l'association. Elle s'appelle Hennieu, je lui ai demandé d'épeler son nom ; me semble-t-il, c'est son prénom qu'elle m'a donné, les pèlerins n'utilisent que leur prénom sur le chemin.

            Je n'étais pas encore tout à fait installé quand est arrivé le pèlerin de Bazas que j'ai revu à Captieux. Il se prénomme Bernard, le 2e Bernard que j'ai rencontré sur cette voie de Vézelay ; et Alain et Cor n'ont pas tardé. Bernard a pris un lit en face du mien, heureusement un peu décalé, car il a ronflé une bonne partie de la nuit.

La découverte de la ville :

            Mes effets bien rangés, sur et autour de mon lit, et n'ayant pas de lessive à faire, je suis allé sans tarder visiter la ville.

            Un passage à l'église s'imposait, les fortifications au temps des guerres de religion se devinent encore ; cet édifice domine les alentours, bien campé sur la rive droite de La Douze. Le petit espace jardin autour de l'église est bien entretenu.

            J'ai traversé ensuite le pont sur La Douze pour me rendre au « Café de la Paix », sur l'autre rive du cours d'eau, là où en principe les clés du refuge sont déposées – mais ce n'était pas le cas pour nous aujourd'hui puisque Hennieu nous avait accueillis directement au local.

            Une petite ville calme, reposante, où il n'y a pas beaucoup de circulation.

Alain est arrivé ensuite, et nous avons goûté un petit vin de la région, vanté par le serveur – pas mal, bien fruité.

            Je suis ensuite passé dans une petite supérette non loin de l'église pour effectuer les achats classiques de l'étape du lendemain.

            Une autre surprise à mon retour au gîte fut de découvrir que Sebastien, le pèlerin un peu en dehors des normes (voir étapes précédentes), si tant est qu'il soit possible de parler de norme, était avec nous pour ce soir. En super forme ! Parfaitement à l'aise – il y a tout lieu de croire qu'il ait bénéficié d'un geste particulier de solidarité de la part d'Hennieu ; et quoi de plus naturel entre pèlerins !

            J'ai eu alors l'occasion de discuter un peu plus largement avec lui. Il a travaillé dans le tourisme, dans l'hôtellerie, mais sans qu'il s'étende sur les raisons qui l'ont poussé à quitter ce secteur. Il m'a dit qu'il traversait une période de quête, de recherche personnelle. Il reste optimiste sur l'avenir. À table, sur tous les sujets, il intervenait avec sérieux, donnant clairement son point de vue. C'était loin d'être le plus réservé ! Je ne l'ai plus revu dans les 7 dernières étapes jusqu'à Saint-Jean-Pied-de-Port



Une belle ambiance au dîner d'Hennieu :

            Hennieu nous avait préparé un vrai repas, ce qui nous a évité de passer aux travaux de cuisine ; et les meilleures volontés se sont instinctivement attelées ensuite à la vaisselle.

            Il y a eu d'abord un apéritif, au moment du passage du président de l'Association locale des Amis de Saint-Jacques. Que les présidents des associations locales n'hésitent pas à se déplacer afin de discuter avec les pèlerins de passage, ne fût-ce que pour rehausser le niveau de l'accueil du jour !

Un homme très ouvert, très gentil ; nous avons discuté des insuffisances du balisage, et il a admis qu'il était difficile de coordonner avec la Fédération Française de Randonnées et aussi, il nous l'a bien confirmé, entre les associations jacquaires pour une uniformisation de tout ce travail de balisage. C'est un réaliste ; nous progressons, nous a-t-il souvent répété.

            Le dîner fut des plus agréables ; il y a eu des discussions de qualité, sur bien des sujets.