jeudi 8 décembre 2022

 

Étape 22 : Mardi 23 mai 18 : Rabanel del Camino :

Photo: l'approche de Rabanal, en 2 011
Je n’ai jamais vu une telle affluence sur le Camino, à 17 heures les pèlerins arrivaient et remplissaient les dernières places dans dans l’albergue que je n’avais pas prévue au départ de cette étape. En principe, ce devait être une longue marche en ce jour, avec toute l’ascension qui mène à la Cruz de Ferro. Et qu’ensuite j’aurais fait la descente qui suit jusqu’à Riego de Ambros.

Il faisait encore sombre lorsque j’ai quitté Astorga ; pas grand monde dans les rues. à la fin de cette agglomération, un grand bonheur alors que le jour se levait à peine, et que j’allais prendre la montée qui mène au sommet de cette montagne, plus exactement à la Cruz de Fero, un lieu plus que symbolique, je suis tombé sur une boulangerie qui donne la possibilité de se faire servir un petit déj. Je me suis bien calé l’estomac avant d’attaquer cette belle montée.

La pente est moyenne, avec des petits raidillons qui sont de véritables tests pour la forme physique. Le premier point attendu, compte tenu du souvenir de mon passages en 2 011 et 2 014 est bien sûr El Ganso – un peu désolé de voir que de l’extérieur ce sont toujours de vieux entourages en bois qui vraiment ne laissent pas deviner que les équipements de cette albergue sont plus que corrects. Et à ce point de passage, en levant la tête on voit bien que tout le reste n’est que montées à travers des petites forêts avant d’arriver à la Cruz de Fero, et de basculer ensuite dans la descente qui même à Riego de Ambros (le but de cette étape au départ.

Photo: 

Photo: devant l'albergue

Et je me suis retrouvé devant une intersection qui m’invitait à Rabanel del Camino dans le sens de la route jusqu’ici empruntée – Je n’étais pas encore au sommet de ce village où se trouve toute une structure d’accueil dans laquelle je me suis arrêté en 2 014 pour prendre un remontant. Et à droite dans l’intersection un regroupement de maisons avec un bar restaurant et un petit hôtel – et c’est alors qu’une dame assise devant un petit bâtiment m’a invité dans son albergue. Elle insista pour que je visite ses installations, dont un espace à l’extérieur pour faire sécher des vêtements lavés. Ce qui me décida d’arrêter ma marche du jour à ce point et de m’installer chez elle. Je n’avais pas à bousculer le temps : au lieu de faire 39 km pour aller jusqu’à Riego de Ambros, je ne faisais que 20 km, coupant en deux parties l’étape prévue. Me laissant ainsi du temps pour explorer ce petit coin de montagne et de forêts où jusqu’ici je ne faisais que passer.

Il était 14 h, lorsque je me suis installé dans ce coin où il y avait tout ce qui faut pour accueillir le marcheur : un bon petit dortoir, un bar restaurant tout près du gîte, et à une cinquante de mètres une zone avec des fils tendus pour faire sécher les vêtements lavés.

Sur un chemin de Compostelle, tout s’improvise et s’enchaine autour des découvertes au fur et à mesure que l’on avance, et particulièrement si l’on est à une 2éme passage sur tel ou tel chemin, et quelles que soient les étapes. Tout est possible sur le Chemin.

Photo: mon lit dans l'albergue


Je me suis donc m’installé dans le dortoir, selon une règle qui m’est propre : un lit en bas, le plus près possible de la porte d’accès (et de sortie), pour pouvoir m’éjecter au plus vite en cas de problème. Et pour la suite, comme d’habitude, le programme passe inévitablement par une bonne bière au bar du coin, avant le lavage et l’exposition des pièces lavées pour le séchage au soleil, et j’ai lancé ensuite une visite élargie du coin. Sans oublier la prise de photos pour des communications diverses.

Et en fin de cette journée du 23 mai 2 018, il y eut un bon repas au restaurant juste à côté ; et à mon retour au gîte, j’ai pu constater que le dortoir était complètement occupé. Mais une constante, une assurance :  sur les grands chemins historiques, dans un dortoir il n’y a pas de bruit la nuit – c’est que le corps privilégie une bonne récupération pour l’étape du lendemain. Tout prévoir, une leçon de vie sur les chemins de Compostelle.

Pourquoi ils arrivent si tard ? Et ce sont des marcheurs avec de gros sacs remplis de vêtements et autres. Pas seulement des Espagnols qui ont besoin des dernières étapes du Camino pour leur CV ! mais aussi des Français bien habillés, d’un certain âge, et même bien pomponnées pour les femmes – qui ne marchent pas sur tout le parcours, et qui utilisent forcément des taxis et autres transports de bagages – d’ailleurs, quand je me suis fait inscrire à mon arrivée, il y avait déjà pas mal de sacs dans les escaliers, leurs propriétaires arrivent ensuite avec du léger. Le couple de Normands que j’ai rencontré la veille – qui sont dans l’agroalimentaire – portaient leurs gros sacs.

La Française qui est dans mon dortoir est depuis des jours et des jours sur la voie du Puy + le Camino. Au cours de la discussion, cela se voit qu’elle est d’un certain niveau, même si elle est sur son premier chemin, elle sait déjà ce que c’est que faire un Compostelle.

Photo: au sommet du petit village.


J’ai cru percevoir la prétention de certains Nordiques – il est vrai que ce sont d’excellents marcheurs – qui affichent parfois un air supérieur, pour ne pas dire des positions de classe – il est vrai qu’ils viennent aussi avec « leurs vieilles poules ». Je n’écarte pas l’idée que cette appréciation est superficielle, mais rien qu’à voir leurs apparences et certaines attitudes dans le bar-restaurant, je peux aller jusqu’à dire que c’est une « clientèle » différente. Il n’est pas impossible que mon appréciation soit tout simplement fausse, et que ce ne sont in fine que des pèlerins à leurs manières.