Étape
16 : Saint-Léonard-de-Noblat.
Photo :
J'arrive à Saint-Léonard-de-Noblat.
Résumé
de l'étape :
Une belle petite étape en
Haute-Vienne, par beau temps. Et d'autant que le paysage est moins vallonné que
dans la Creuse, mais avec quand même quelques casse-pattes. J'ai aussi retenu
une montée des plus boueuses en forêt dans la matinée.
Saint-Léonard est une petite cité
religieuse. J'étais au refuge, situé au centre bourg, et à côté de la collégiale
où se trouvent les reliques du saint. J'y ai passé de bons moments avec des
pèlerins rencontrés lors des étapes précédentes.
Françoise
et Jojo, au rendez-vous :
J'étais le premier réveillé, et j'ai
pris mon petit-déjeuner tout seul : La responsable du gîte avait posé sur
une table dans la salle d'accueil tout le nécessaire : une bouilloire
électrique, du thé, des biscuits, du sucre, du beurre et de la confiture, etc.
J'avais rendez-vous avec Françoise, la pèlerine, à 7H30, mais j'ai eu un peu de
retard parce que j'ai dû attendre qu'Alain descende de sa chambre pour lui
remettre la solution d'arnica qu'il m'avait prêtée à Bénévent-l'Abbaye. Ce
n'est qu'à 7H45, que j'ai passé la porte du gîte pour aller sur la place de
l'église des Billanges. Et ce fut une surprise de voir plantés devant le
portail Françoise et son mari Jojo. C'était le même scénario qu'à Oloron en 2
013, sur la voie d'Arles, qui se reproduisait – les deux étaient en avance au
point de rendez-vous. Françoise, sac au dos, a toujours la forme, et un Jojo
qui ne vieillit pas. Françoise venait faire avec moi trois étapes.
Sans tarder, elle et moi avions pris
le balisage dans la rue près de l'église ; nous avons revu Jojo deux jours
plus tard à Saint-Martin-le-Vieux, je devais alors terminer tout seul l'étape
qui me menait à Flavignac.
Le
déroulement :
Nous avons continué sur la D 29, et
après un bon quart d'heure nous avons pris la D 5, direction
Saint-Léonard-de-Noblat.
Les moments les plus
importants : le passage du Pont du Dognon, et nous sommes
arrivés ensuite à Châtenet-en-Dognon ; et par des petites départementales,
des chemins pierreux ou de terre, nous sommes arrivés à Saint-Léonard-de-Noblat
(voir photo). Nous avons suivi le balisage d'un bout à l'autre de l'étape.
Une difficulté classique du début de
cette voie de Vézelay que je n'ai plus rencontrée ces derniers temps : un
passage des plus boueux en forêt. Non seulement, il faut monter, mais l'eau qui
suinte de partout et les piétinements des marcheurs entretiennent au maximum la
couche de boue, avec des risques de chutes qui pourraient entraîner au minimum
des lavages supplémentaires à l'arrivée.
À noter qu'à la fin du parcours,
dans une montée assez raide, nous avons été dépassés par Jean-François – nous
n'avions pas cherché à prendre son pas : il est grand, il marche vite, et
il se paye des détours pour le plaisir de la découverte. Il est vrai que son
but n'est pas de faire toute la voie de Vézelay.
Un
refuge avec cuisine en gestion libre :
En arrivant, nous sommes allés
directement au refuge qui se trouve à côté de la collégiale
Saint-Léonard-de-Noblat (voir photo). En jetant un œil sur la porte d'entrée, je me suis
dit : et encore une porte à code ! me rappelant mon passage au gîte
municipal de Chârost. Si ma mémoire est bonne, le code était écrit sur une
affichette collée sur la porte ; en appelant la responsable au téléphone,
il est possible de se faire communiquer ce code qui, bien entendu, change tous
les jours. Cette responsable savait bien que je comptais passer dans cet
hébergement puisque je l'avais eue au téléphone la veille ; son passage
était aussi programmé dans l'après-midi. C'est avec elle que se règlent les
formalités administratives de l'hébergement : le paiement de la nuitée, et
le tampon sur la crédancial officialisant le passage du pèlerin en ce lieu.
J'ai tapé le code, et en tournant la
poignée la serrure a fait un certain bruit, mais la porte ne s'est pas ouverte.
Au 2e essai, la serrure s'est bloquée, et, miracle, la porte a cédé
tout d'un coup sur Jean-François qui l'avait actionnée de l'intérieur. Il était arrivé avant nous, et il avait sans doute fait la démarche de
façon à mettre ce code à la portée des autres arrivants. La technique est dans
le coup de main, m'a-t-il dit, il faut bien appuyer sur la porte pour que le
mécanisme d'ouverture s'enclenche. De toute façon, il n'y avait plus de
problème, je n'étais pas le seul dans ce refuge, et il y aura toujours
quelqu'un à l'intérieur si la serrure continue à faire des siennes, d'autant
que les trois autres d'hier soir n'allaient pas tarder à arriver. Il n'y a eu
aucune concertation pour s'arrêter dans ce gîte.
Ce gîte est d'une très bonne tenue.
Il n'y a pas de dortoir, mais des chambres ; Françoise et moi avions choisi
une, et les autres pèlerins se sont répartis dans les deux autres.
Le groupe d'hier soir aux Billanges
s'était reconstitué ; tout allait pour le mieux. Aussi, une fois
l'installation faite, je suis sorti comme d'habitude pour une petite visite,
prendre des photos et passer à la pharmacie, j'avais à renouveler mon gel
d'arnica.
Une
visite en ville :
La visite en ville est des plus
simples puisque le principal centre d'intérêt est tout à côté du
refuge : la collégiale de
Saint-Léonard-de-Noblat.
Cet édifice est inscrit au
patrimoine mondial au titre des chemins de Saint-Jacques. Les pèlerins peuvent
vénérer les reliques du saint placées dans une structure en fer suspendue dans
le cœur. Pour obtenir les bienfaits du saint, ils passent au-dessous de ces
reliques. Le chœur de l'église est aménagé pour permettre justement la
circulation des pèlerins sous cette cage de fer (voir photo) et (photo).
Le clocher présente une
particularité architecturale : il est formé de 4 étages carrés surmontés
de 2 étages octogonaux (voir photo).
Saint-Léonard est un Franc de la
noblesse de l'époque, il était à la cour de Clovis. Il s'est fait ermite dans
la forêt de Pauvain (Limousin). Il est connu comme libérateur des prisonniers,
et il a la réputation d'aider ceux qui attendent une délivrance, comme les
femmes enceintes ou même les femmes stériles (voir photo).
Il
n'y a pas eu de miracle à Saint-Léonard-de-Noblat :
Comme d'habitude, pour mes visites
après la marche, j'apporte ma caméra, et un seul bâton, par précaution, pour le
cas où j'aurais à rattraper une glissade sur le rebord d'un trottoir, ce qui
est toujours possible étant donné que j'utilise des savates pour les balades en
ville.
Pour être plus à l'aise, j'ai déposé
mon bâton contre le mur d'une maison portant le label « gîte de
France », en face de la collégiale, et elle était fermée. J'ai filmé
l'extérieur et l'intérieur de l'église.
Ensuite,
je suis allé à la pharmacie, un peu plus loin, après avoir emprunté un dédale
de rues – j'ai dû d'ailleurs demander à un passant des précisions sur cette
adresse. Puis, je suis rentré au refuge.
C'est alors que je me suis rendu
compte que je n'avais plus mon bâton. Je suis ressorti aussi vite pour aller le
chercher, mais il avait disparu. J'ai l'habitude de marcher avec deux bâtons
depuis plusieurs années – un avantage certain : ils supportent à peu près
10% du poids du sac, évitent de tirer trop sur les jambes dans les montées,
protègent les genoux dans les descentes, corrigent la gîte du sac-à-dos en cas
de chute, et permettent aussi de donner plus de vitesse à la marche en
actionnant davantage les bras. Avec un seul bâton pour la suite,
psychologiquement surtout, je crois que je me sentirai diminué.
Je suis reparti à la pharmacie, je
l'avais sans doute posé dans un coin. Après une inspection rapide de la salle,
une évidence s'imposait : il n'était pas non plus à cet endroit ! Je
suis retourné au refuge, et avant d'y entrer, j'ai revérifié une nouvelle fois le
mur où je l'avais laissé, quelqu'un aurait pu le déplacer pour toutes sortes de
raisons. Rien ! À moins qu'un jeune n'ait voulu en faire un jouet pour
amuser ses copains. Je suis rentré à mon hébergement, et j'ai annoncé aux
autres que je l'avais vraiment perdu, et qu'il me faudra attendre Limoges pour
le remplacer.
Mais je ne cessais de faire défiler
dans ma tête le film de mes différents parcours en ville, pour me souvenir
qu'après mon passage à la pharmacie, j'étais aussi au Leader Price où Alain et Cor
s'occupaient des produits pour le dîner en commun pendant que je faisais de
petits achats personnels ; et qu'il n'était pas impossible que je l'eusse
laissé contre un chariot. Je suis donc ressorti pour vérifier... et je n'ai
rien trouvé. En repassant devant la pharmacie, j'ai cette fois demandé à la
pharmacienne si elle n'avait pas récupéré un bâton de marche. Toujours
rien !
Sur le retour, je me disais qu'il ne me restait plus qu'à espérer une intervention exceptionnelle de Saint-Léonard... quoiqu'elle soit, en ce qui concerne les objets perdus, plutôt du pouvoir de Saint-Antoine de Padoue. Passant devant l'église, j'ai jeté machinalement un œil sur le mur en question... et j'ai vu mon bâton, exactement à l'endroit où je l'avais laissé ! Et c'est en le brandissant fièrement que je suis entré au gîte, où les autres s'affairaient déjà à la préparation du repas. Il y a quelqu'un qui a lancé : mais c'est un signe ! Moi, je cherchais toujours une explication disons rationnelle, et je l'ai trouvée un peu plus tard : dans la maison « Gîte de France », il y avait, paraît-il, un couple de marcheurs allemands, et vraisemblablement, ce sont eux qui l'ont « ramassé » avec de bonnes intentions, et, sans doute, ayant remarqué mes différents passages devant ce mur, ils l'ont remis à sa place. Ces deux-là, je les ai rencontrés plus loin sur le chemin, la femme parle en peu le français, mais l'homme pas du tout. Je les ai trouvés très sympathiques, mais je n'ai pas voulu les ennuyer avec mon histoire de bâton. Il n'y a pas eu de miracle à Saint-Léonard-de-Noblat.
Un
excellent dîner, et une bonne nuit :
C'était la première fois sur ce
chemin de Vézelay que je me retrouvais dans un groupe ambitionnant de préparer
un dîner. C'est principalement Alain qui était à la manœuvre comme
cuisinier ; Jean-François, Cor et Ole l'ont aidé, bien entendu. Les
spaghettis à la « Bolognaise » ont été unanimement appréciés. Pour la
suite, bien que j'aie un doctorat ès vaisselle, je n'ai été que l'assistant de
Françoise : la plonge, c'était elle ; moi je ne faisais qu'essuyer et
ranger. Mais je savais que j'aurais moult occasions d'approfondir mes
connaissances dans ce domaine.
Ce que j'ai apprécié, c'était comme
si nous nous connaissions depuis longtemps sur ce chemin, qu'il y avait des habitudes
quant à la part que chacun peut et doit naturellement apporter au groupe. Une
application des notions d'aide et de partage. Il faut dire aussi que pour tous
les cinq, nous n'étions pas à une première expérience sur le chemin. Mais
l’intégration à un groupe est un chemin en lui-même, qui n’y aboutit pas
forcément, la part de liberté que chacun s’accorde étant en effet précieuse.
La
nuit a été tranquille.