jeudi 5 mars 2020


Étape 31 : de Roquefort-de-Marsan à Mont-de-Marsan : 28 km.

Photo : J'arrive au gîte de Mont-de-Marsan.

Résumé de l'étape :

            Dans cette étape, nous étions le plus souvent en forêt, il n'y a pas beaucoup de zone de culture. Le chemin dans la première moitié est peu décalé par rapport à la D 932, il ne fait pas de grands détours dans la campagne ; il s'en écarte davantage dans la 2e moitié, mais dans l'ensemble il file pratiquement tout droit jusqu'aux environs de Bougue. Il retrouve alors l'ancienne ligne de chemin de fer qui a été transformée en voie verte, piste cyclable, qui emmène les marcheurs directement à Mont-de-Marsan.

            Mont-de-Marsan est la dernière très grande ville que traverse le chemin avant Saint-Jean-Pied-Port. Mais nous n'avons pas pu la visiter : après cette longue étape, nous avons dû attendre 18 h au gîte de l'association locale pour qu'une responsable vienne ouvrir un autre dortoir, celui qui a été ouvert à son premier passage a été vite occupé. Il y a eu des pèlerins dans cette étape, et si nous ne les avons pas vus jusqu'ici, c'est vraisemblablement parce qu'ils avançaient dans un autre découpage sur cette voie de Vézelay.

Le déroulement de l'étape :

            Au départ de Roquefort, comme hier, une petite pluie fine nous attendait, et nous avons dû sortir le poncho. Nous avons repris le balisage à l'église ; après la petite bosse, le chemin descend vers le pont gothique sur La Douze.

            Plus loin, nous avons retrouvé la forêt de pins et nous sommes passés par deux petits villages, Bostens et Gaillères, en suivant la même petite route départementale. Nous avons ensuite quitté les bois et retrouvé des zones de culture – et encore une mauvaise utilisation de la balise européenne : la direction indiquée par les rayons de la coquille est en contradiction avec la partie fléchée jaune (voir photo).

            À l'approche de Bougue, la pluie avait légèrement repris et nous avons découvert sur le bord de la route, à l’entrée du village, un ancien lavoir bien reconstitué. C'est un abri qui tombait bien. Alain a sorti de son sac ses pâtes, et Cor et moi avions proposé du fromage, des fruits et des petits gâteaux secs. Il y a des petits murs pour s'asseoir, et nous avons pris notre temps pour nous sustenter convenablement, bien des kilomètres nous attendaient encore avant de rejoindre Mont-de-Marsan.

            En partant de « notre restaurant », la pluie s'est mise à tomber un peu plus fort, et j'ai dû sortir un petit sac de plastique pour protéger mon téléphone, tout en le gardant à la ceinture. Lorsque nous avons pris la montée tout de suite après le village, une grosse averse nous est tombée dessus et j'ai dû actionner complètement la fermeture Éclair de mon poncho pour garantir au mieux mes affaires. Elle n'a pas duré ; mais nous avons dû sortir et rentrer nos équipements de pluie en plusieurs fois avant l'arrivée.

            Nous avons ensuite pris l'ancienne ligne de chemin de fer, qui est aménagée en voie verte, avec des bancs dans des zones de repos, et qui est aussi une piste cyclable. Cependant, nous n'avons pas vu beaucoup de cyclistes.

            C'est presque à la fin de cette piste que nous avons rencontré des femmes qui entamaient gaillardement leur marche, et c'est avec plaisir que nous avons un peu échangé, sans oublier de saluer leur courage : il faut être vraiment des habituées pour se lancer sur une piste en fin d'après-midi par un temps plus que maussade. À proximité d'une grande agglomération comme Mont-de-Marsan, avoir une belle piste sécurisée pour faire un peu d'exercices est une chance ; et, par beau temps, en week-end, il doit y avoir une foule de Citadins dans cet espace réservé au sport et à la détente.

            Nous sommes entrés ensuite dans l'agglomération, et après avoir passé par des feux tricolores de circulation - le balisage est bon dans la ville – nous sommes parvenus à notre gîte. Nous avons eu quelques hésitations à trouver l'entrée parce qu'il y avait des réparations à l'intersection où se trouve cet hébergement de l'association locale des amis de Saint-Jacques.



Une petite inquiétude pour la gîte :

            C'est la première fois, du temps où je marchais seul ou plus récemment dans le groupe d'Alain, que je découvrais en arrivant un hébergement déjà fort bien occupé. Renseignements pris auprès des pèlerins déjà installés, la dame responsable devait repasser vers les 18 heures pour éventuellement ouvrir un autre dortoir. Il ne nous restait plus qu'à l'attendre dans la salle d'accueil.

            C'est aussi la première fois sur cette voie de Vézelay que j'ai découvert un radiateur spécialement conçu pour sécher les chaussures. Il y avait encore une petite place disponible, je pouvais donc caser les miennes. Et de plus, il y avait aussi tout à côté suffisamment des restes de vieux journaux pour les bourrer, de façon à accélérer encore le séchage, le papier absorbant l'humidité. Je n'avais que cela à faire ; et j'ai tué encore le temps en jetant un œil sur toute la bonne documentation présente sur la table ou affichée au mur.

            Elle est arrivée exactement à 18 h, et il n'y a eu aucun problème ; elle a ouvert un dortoir pour Alain et moi ; Cor et Bertrand avaient réussi à se caser dans une autre salle.

            Nous étions donc dans une assez grande pièce où il y a deux lits, deux douches et une petite salle d'eau. Deux Hollandaises sont arrivées ensuite, et la dame a ouvert une autre petite salle-dortoir contiguë à la nôtre pour ces deux dernières. Après les formalités d'usage, elle nous a donné une information importante : non loin du gîte un restaurant présente aussi un menu pèlerin sur sa carte, la présentation de la credencial étant obligatoire. Tout finit par s'arranger !



Le corps et l'esprit :

            Il n'est pas surprenant d'entendre parfois cette affirmation quelque peu péremptoire : c'est l'esprit qui commande le corps. Au-delà de la question de la suprématie, le plus simple est de considérer les interactions entre ces deux entités, qui marchent ensemble, et de considérer plus la gestion de ces interactions. Aujourd'hui, j'ai encore souffert d'une tendinite au talon, mon esprit me disait que je n'avais pas à m'en préoccuper, je n'ai donc rien pris pour calmer cette petite douleur. Je l'ai oubliée, mon corps l'a éliminée, et elle a fini par m'oublier aussi. À l'arrivée, je me suis rendu compte que je ne sentais plus rien à ce niveau. C'est réconfortant de voir comment le corps, dans l'effort, récupère et se régénère même d'une certaine façon. Que cela dure ! La santé est dans le mouvement.

            Mais aussi dans l'alimentation !  J'ai observé une fois de plus mon ami Cor, il mange tout le temps. J'ai déjà constaté que dans les 5 derniers kilomètres une orange rebooste la machine ; je peux même dire que l'effet est pratiquement immédiat. Mais souvent, même lorsque j'y pensais, je n'avais pas envie de descendre mon sac, je me disais que je pouvais encore tenir. L'erreur est là ! Il faut s'alimenter régulièrement, parce que la dépense est constante, longue. Et c'est là que l'esprit commande. Plus d'une fois, j'ai vu Cor distribuer tout en marchant ce qu'il mangeait : un petit morceau de fromage, une petite part d'orange ou de pomme, une pastille, un bout de chocolat, etc. Tout le monde, dans la vie de tous les jours, ne mange pas ceci ou cela, à raison ou à tort, mais j'ai compris que sur le chemin, il faut s'appliquer à manger de tout, même en dehors des habitudes – il y a bien sûr des exceptions précises – parce que le corps en a besoin. Et, bien entendu, il faut penser à boire régulièrement de l'eau. J'ai rencontré des pèlerines qui oubliaient de le faire, et quand la déshydratation est bien avancée, il n'est pas facile de récupérer la forme. L'eau, c'est la vie !



Un petit tour en ville :

            Je ne pouvais pas ne pas faire un petit tour en ville. Comme je suis parti les mains dans les poches, sans plan, bien que je sois sûr de pouvoir m'appuyer le cas échéant sur mon portable, à condition qu'il y ait du réseau Internet. Aussi je me suis appliqué à bien caler dans ma tête les noms des rues, et le petit circuit que je comptais faire au coup d'œil. Vu l'heure tardive, il n'était pas question de faire de grandes visites, et dans mon petit circuit, j'ai rencontré les deux autres du groupe à la terrasse d'un bar. Mais je devais rentrer parce que j'avais à faire un petit travail un peu délicat sur mon téléphone : réserver et payer mon billet de train de Saint-Jean-Pied-de-Port à Paris, gare Montparnasse. Parce que j'étais à peu près sûr de tenir mon découpage jusqu'au bout, et que je ne devais pas rater mon avion pour le retour à la Réunion le lendemain de mon arrivée à Paris – rater son avion peut entraîner un supplément de 250 € pour retrouver au plus vite une place dans un autre avion de la même compagnie.



Un bon restaurant pèlerin :

            Le soir, nous nous sommes retrouvés sur la même table au restaurant pèlerin, le serveur ne nous a pas demandé de credencial pour avoir droit au menu pèlerin – il est vrai que cela se voyait au premier coup d'oeil. Nous étions quatre : Alain, Cor, Bertrand et moi. Une bonne petite table, un bon petit groupe, un bon moment. Bertrand nous a offert 2 bouteilles de vin (voir photo), et il n'y a pas eu de refus – le vin est le sang du pèlerin ! Pour 11,50 €, j'ai bien mangé. Ah, si à chaque arrivée d'étape, il pouvait y avoir un tel restaurant pour apaiser la faim des marcheurs !

            Au retour, nous étions bien calés, et il n'y avait pas de doute pour moi, tout le monde devait passer une bonne nuit – il est vrai que l'étape du lendemain, Saint-Sever, devait être plus que reposante avec ses 19-20 kilomètres seulement. Quoiqu'il faille se méfier des petites étapes...