jeudi 1 août 2019



Jeudi 1 août 2 019

Première partie de l’étape 2 : Champlemy, 26 km : lundi 18 mai 2 015

Photo : à l'église de Cuncy-lès-Varzy


Résumé :

            Ô mes aïeux, quelle étape ! Je me souviendrai longtemps de Champlemy. J'ai cru avoir fait beaucoup plus de 26 kilomètres. J'étais particulièrement à l'écoute d'une réaction musculaire après un effort prolongé, mais tout s'est bien passé de ce côté-là. J'ai été plongé en fin de journée dans une forêt qui me paraissait sans limites, au point de ne plus savoir ce que j'allais découvrir en sortant de ces bois. Pourtant même blessé au pouce gauche avec mon Opinel en épluchant une orange – c'est vrai que dans la marche, ce sont les pieds qui trinquent, mais le sac est monté et descendu une bonne vingtaine de fois dans la journée, et, à chaque fois, pour être bien installé sur les épaules, le travail des doigts de la main est important –, j'ai toujours été d'attaque. Je ne suis jamais rentré aussi tard à un gîte, et, pourtant j'ai effectué tous les préparatifs habituels de l'étape du lendemain. Je n'ai jamais aussi bien mangé et bu le soir d'une arrivée, et, pourtant, les 35 km pour aller à La Charité-sur-Loire le lendemain ne m'ont pas tellement préoccupé avant de dormir. Oui, j'ai souffert, mais je me disais qu'après Champlemy toutes les étapes ne pouvaient être que plus faciles. Je ne mesurais pas encore complètement que d'autres forêts aussi importantes m'attendaient...

Avec Denise et Alexis, dans une première partie de cette étape :

            J'ai retrouvé Denise et Alexis dans une salle au rez-de-chaussée du « Relais Fleuri » pour le petit déjeuner. Il y avait de tout pour bien se caler. Il était convenu de faire le chemin ensemble sans que nous ayons échangé en quoi que ce soit sur le parcours – il me semblait bien que des échanges sur ce point eussent été quelque peu déplacés. Après un passage dans nos chambres respectives, nous nous sommes retrouvés dans la cour.

            Nous avons remonté la rue qui part du monument aux morts de Tannay (voir photo), et ce n'est que plus loin que nous avons vu une autre balise du GR, près d'un supermarché où nous avons fait quelques petits ravitaillements. J’avais commencé à remarquer que mes deux compagnons du jour faisaient pas mal de ravitaillements – à aucun moment je ne leur ai demandé le but de l’étape du jour pour eux.

            100m après le supermarché, nous sommes arrivés à un carrefour où le balisage est bien présent : le GR bien entendu, mais aussi une inscription Compostelle qui indique une partie de la suite : Cervenon (6 km), Thurigny (8 km), Varzy (20 km), par la D6. Mais un peu plus haut, une autre balise du GR nous invitait à prendre à droite pour aller dans les champs. Pourquoi pas ? Nous avions ainsi fait tout un circuit qui nous a conduits à une église fermée, partie certaine du patrimoine de la région, où seul le clocher a commencé à être restauré (voir photo, et photo). Nous avons dû demander à des gens pour retrouver le GR qui nous a baladés ensuite dans les champs. Certes, mais pour moi, c’était encore une agréable marche matinale... pour retrouver la D6 presque à l'entrée de la forêt de Tannay, à un point que nous aurions pu atteindre en un quart d'heure si nous n'avions pas auparavant quitté la départementale. Il est vrai que le chemin ne se fait pas non plus en fonçant sans rien sentir et découvrir du patrimoine des petites régions traversées ! Néanmoins, si j'étais seul, j'aurais fait l'impasse sur cette petite église.

            Nous étions alors sur une route extrêmement pentue qui montait presque tout droit dans cette forêt, et j'ai vite remarqué qu'Alexis avait des difficultés à marcher, tandis que sa femme tenait un bon pas. Nous avions été rejoints par un autre pèlerin, Jacques, jeune retraité d'une région proche qui dès les premiers contacts avait tenu à nous faire part de son irritation quant aux mauvais descriptifs de son guide, qu'il avait failli d'ailleurs jeter après s'être perdu dans l'étape d'hier. Nous avons dû faire une pause, Alexis avait besoin de souffler, mais sans que l'accent ait été mis sur quelque grosse difficulté que ce soit (voir photo). Néanmoins, je pense que l’homme avait quelques petits problèmes intestinaux, mais, de toutes façons, sur le chemin, la nature nous ouvre généreusement ses bras pour nous apaiser de ce côté-là.                                                        

Après avoir passé le sommet, nous avons effectué une belle et longue descente qui donne un aperçu des beaux paysages qui attendent les marcheurs. Alexis avait récupéré et avançait même à un bon rythme sur le plat. D'ailleurs dans un champ, plus loin, il a soutenu une belle cadence, le peloton étant toujours emmené par sa femme, mais dès que la route s'élevait un peu, il ralentissait nettement. C'est ainsi que nous sommes passés à Cervenon et à Thurigny, par des prairies et des bois sur une route vallonnée. Nous avons fait une autre pause avant Saint-Germain-des-Bois – c'est le couple qui a pris l'initiative de s'arrêter à la vue de bancs et de tables (voir photo). Et à chaque arrêt, chacun des deux prenait soin de s'alimenter un peu.

            Je trouvais alors que la tendance était à ne pas trop se préoccuper du temps qui passe ; cela m'inquiétait un peu vu que mon but était Champlemy, et qu'il fallait du temps pour y aller, les autres n'annonçant pas leur destination. Je crois même qu'à un moment, j'ai un peu poussé le groupe à ne pas trop tarder à repartir.

À chacun son chemin :

            Jusqu'ici, nous étions sous le « régime » des balises du GR, avec une petite confusion à l'entrée de Cuncy-lès-Varzy. À l'église de ce bourg, nous avons décidé de manger et il était d'ailleurs un peu plus de 12H (voir photo). L'heure de prendre quelque chose de plus consistant était venue, d'autant qu'il y avait un petit muret avec une partie à l'ombre, nous avons décidé de manger à cet endroit, quoique la zone fût un peu trop vantée à mon goût. En 10 minutes pour moi c'était fait ; les autres prenaient vraiment leur temps. J'ai utilisé encore une dizaine de minutes pour des photos – au monument aux morts près de cette église, sur un présentoir, une inscription a attiré mon attention : « Le vrai tombeau des morts, c'est le cœur des hommes ». Une belle phrase !

            Et les autres continuaient de manger paisiblement... alors je suis allé leur dire : Je vais partir, car mon point d'arrivée, Champlemy, est à 16 km d'ici, et il est plus de 13 H. Étrangement, il n'y a pas eu de réaction de leur part ; ils sont restés impassibles.  Une question est apparue à mon esprit ; est-ce que je les gênais ? C’est qui est sûr, c’est que pour eux le temps ne comptait pas. Je suis alors parti sur la pointe des pieds comme pour ne pas les déranger… À chacun son chemin ! Et j'ai marché seul jusqu'à l'arrivée. Je ne les ai plus revus.

Mais j’ai commencé à comprendre que nous ne faisions pas ce chemin sur la même base : eux, ils avaient tout leur temps tandis que moi je devais tenir mon plan : réaliser les étapes prévues pour aller jusqu’au bout.

Suite de cette étape de Champlemy à la prochaine publication.